Lorsque le président a ouvert son intervention devant le Congrès en indiquant qu’il allait être plus bref qu'à l'accoutumée, tout le monde a compris que Barack Obama allait se livrer à l'un de ses exercices de prédilection, à savoir les longs cours magistraux.
Chaque élément du bilan de ses deux mandats a été développé. Et les critiques de ses adversaires ont été réfutées point par point. « L’économie américaine et la plus dynamique du monde, et ceux qui disent le contraire colportent des mensonges », a taclé le démocrate.
Et de dérouler ses chiffres : 14 millions d’emplois créés en sept ans, le carburant à 50 centimes le litre, etc. « L’Amérique va bien, l’économie n’a jamais été aussi forte et créatrice d’emplois depuis les années 1990, 20 millions d’Américains ont acquis une couverture sociale. »
Un bilan optimiste, tel qu’annoncé. « Les Etats-Unis sont et resteront la première puissance mondiale », se félicite M. Obama, qui est revenu sur d'autres points forts de son mandat, comme l’accord sur le nucléaire iranien, la reprise des relations avec Cuba - il a appelé à une levée de l'embargo -, le partenariat commercial trans-Pacifique ou encore la COP 21.
Mais le président américain s’est également projeté dans l’avenir, intervenant dans la campagne électorale. Cette dernière bat son plein, avec les primaires dans chaque camp. Et Barack Obama a exhorté les Américains à ne pas céder à la peur instillée, selon lui, par les républicains.
« Il ne faut pas imaginer que les problèmes seront réglés en déversant des tapis de bombes », a-t-il par exemple déclaré au sujet de l'intervention américaine au Moyen-Orient, faisant allusion au candidat des Tea Party, Ted Cruz.
Le président se lance de plain-pied dans le débat présidentiel 2016
De manière générale, en matière de politique internationale, le président a longuement développé sa philosophie, celle qui lui vaut tant de critiques. Selon lui, en quelques mots, l’Amérique n’a pas vocation à intervenir sur tous les terrains de crise (voir encadré en bas de cet article).
En dépeignant l’Amérique idéale, l’Amérique qui augmente les salaires modestes et intègre les migrants, le président des Etats-Unis a clairement engagé ses concitoyens à choisir, encore une fois, le camp démocrate, « la tolérance contre la stigmatisation », lors de la présidentielle.
Ce dernier discours sur l’état de l’Union visait d'ailleurs à rappeler ce que sont les valeurs cardinales des Etats-Unis, du point de vue de leur 44e président. Ce dernier a notamment consacré un long passage au respect nécessaire de tous, « une valeur américaine » selon lui.
« Lorsqu’un responsable politique insulte les musulmans, qu’il s'agisse des étrangers ou de nos concitoyens, cela ne rend pas le pays plus sûr, cela nous affaiblit aux yeux du monde, cela nous empêche d’atteindre nos objectifs », a plaidé Barack Obama.
Et d'utiliser aussitôt ces mots très forts : « C’est une trahison envers ce que nous sommes, une trahison envers notre pays. » Donald Trump, le candidat républicain qui caracole en tête des sondages, appréciera.
Pour finir le règne, un plan cancer et la lutte pour venir à bout de Guantanamo
Avant l'évènement du jour au Congrès, la Maison Blanche avait aussi promis des projets, des annonces pour la fin du mandat. Une année, c’est très court, mais cela n’a pas empêché M. Obama de lancer un grand plan pour « éradiquer le cancer », une mission confiée au vice-président Joe Biden.
Et puis, Barack Obama est revenu sur Guantanamo, persistant dans son idée de vider la centrale, à défaut de pouvoir la fermer. Cette prison est un appel au recrutement dans les rangs de nos ennemis, a dénoncé le président, empêtré dans ce dossier depuis le début de son règne.
Le seul regret du président est de n’avoir pas réussi à construire un pont entre démocrates et républicains. « La rancœur et la suspicion vont de mal en pis », a-t-il observé, alors que la campagne électorale exacerbe encore un peu plus les divisions entre les deux grands partis du pays.
L’an prochain, c’est un autre président élu qui définira ses priorités devant le Congrès. Voir un candidat démocrate parvenir à succéder à un président démocrate, cela ne s’est pas produit depuis les années 1940, entre Roosevelt et Truman - si l'on omet la succession quelque peu particulière entre Kennedy et Johnson.
Pour Barack Obama, voir arriver un successeur démocrate serait sans aucun doute l’espoir de voir les projets en cours se concrétiser, comme une touche finale à son bilan. Mais à n'en pas douter, le Congrès, désormais dominé par les républicains, espère autre chose. Dans les deux cas, l'an prochain, c’est le 45e président élu qui définira ses priorités devant les parlementaires.
■ Extrait du discours du président Obama
« L’Amérique est la nation la plus puissante de la Terre, un point c’est tout. Et quel que soit le problème dans le monde, les gens ne se tournent pas vers Pékin ou Moscou, c’est nous qu’ils appellent ! Aujourd’hui, nous sommes moins menacés par des " empires du mal " que par des Etats en faillite.
Certes, al-Qaïda et, à présent, le groupe Etat islamique, nous menacent et nous devons nous en débarrasser. Mais ils ne menacent pas notre existence ! C’est la fiction qu’ils répandent, c’est le genre de propagandes qu’ils emploient pour recruter. Mais nous devons les prendre pour ce qu’ils sont : des tueurs et des fanatiques.
Oui, notre politique étrangère doit se concentrer sur la lutte contre le terrorisme, mais cela ne peut s’arrêter là. Et notre réponse doit être plus intelligente que des rodomontades ou des appels à déverser des tapis de bombes sur des civils. C’est bien dans un show télévisé, mais c’est complètement irréaliste.
Nous ne pouvons pas non plus prendre en main et reconstruire chaque pays en crise. Ce n’est pas cela être un leader. C’est juste la recette pour s’enfoncer dans un bourbier. C’est la leçon tirée du Vietnam, c’est la leçon de l’Irak, et nous aurions dû la comprendre depuis tout ce temps. »
Source :Rfi.fr
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