En Guinée équatoriale, où le scrutin présidentiel se tient dimanche 24 avril 2016, le président est élu à deux tours comme dans la plupart des pays africains. Or personne n’imagine que le chef de l’Etat équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema, au pouvoir depuis 36 ans et candidat à sa propre succession, puisse être mis en ballotage. Les six autres candidats validés par la commission électorale qui est dirigée par le ministre de l’Intérieur du gouvernement sortant en personne n’ont guère le poids politique nécessaire pour mettre le président sortant en difficulté. Selon l’opposition, qui a appelé à boycotter le scrutin en raison du manque de garanties quant à son déroulement sans fraudes, le candidat du pouvoir est assuré de remporter l’élection, vraisemblablement avec un score supérieur à 90%. Teodoro Obiang Nguema n’avait-il pas été réélu en 2009 avec 95,37% de voix ?
En effet, l’enjeu du scrutin de dimanche n’est pas électoral, mais économique et politique. A cause de la chute des prix de l’essence depuis trois ans, l’économie de la Guinée équatoriale, qui est le troisième producteur du pétrole de l’Afrique subsaharienne après le Nigeria et l’Angola, est à l’arrêt. Le pays est entré en récession depuis 2013, avec un PIB de – 10, 2% enregistré en 2015, obligeant l’Etat équato-guinéen de suspendre les projets d’infrastructure gigantesques qu’il a lancés pour rattraper son retard.
« Avec un chômage qui frise quasiment 10% de la population, explique Lucas Olo Fernandes, chercheur spécialisé dans les pays de l’Afrique centrale à Transparency International, la situation sociale est explosive et le gouvernement craint que le mécontentement ne conduise au désordre et au chaos, comme cela s’est produit au Burkina Faso. D’où ce scrutin présidentiel anticipé qui permet au président Obiang Nguema de gagner du temps et attendre que le marché pétrolier se ressaisisse pour pouvoir préparer tranquillement sa succession. Depuis plusieurs années, il prépare son fils Teodorin, devenu le deuxième vice-président du pays, pour reprendre son relai, mais cette succession ne sera pas automatique, car le dauphin présumé a été inculpé en France dans les affaires de biens mal acquis. »
Autoritarisme et corruption
Doyen des chefs d’Etats africains par sa longévité au pouvoir, le président Obiang Nguema a pris les rênes de son pays en 1979, après avoir renversé par un coup d’Etat le gouvernement sanguinaire de son prédécesseur et « oncle » Francis Macias Nguema qu’il fera fusiller. Lui aussi, il a mis en place un régime autoritaire qui, pendant les 36 ans de son existence, a été régulièrement dénoncé par les organisations de défense des droits de l’homme pour sa répression des opposants, des organisations indépendantes de la société civile et des médias, ainsi que pour l’étendue de la corruption qui vaut à la Guinée équatoriale la 163e place sur 175 dans le rapport de l’ONG Transparency International.
La corruption a connu une ampleur inédite depuis que ce petit pays de 1 million d’habitants est devenu un pays pétrolier, avec la découverte du champ pétrolier de Zafiro en 1996. Avec une production de pétrole brut estimée aujourd’hui à autour de 400 000 barils/jour, l’économie équato-guinéenne s’est tournée au cours des deux dernières décennies vers l’exploitation d’hydrocarbures qui représentent 99% de ses exportations et 88,7% de son PIB, lequel a été multiplié par dix entre 1999 et 2009. Cela a fait de la Guinée équatoriale l’un des pays les plus riches de l’Afrique, avec le PIB par habitant le plus élevé du continent noir, plus proche de celui de la Grèce et de la Hongrie que celui de ses voisins de l’Afrique centrale.
Outre le pétrole, la Guinée équatoriale produit aussi du méthanol et du gaz naturel liquéfié. Or cette manne de matières premières ne profite guère à la majorité de la population qui vit sous le seuil de la pauvreté, avec moins de 2 dollars par jour. Selon les statistiques des organisations internationales, 70% de la population demeure pauvre, 33% de la population rurale dispose de l’eau potable et 43% de l’éclairage électrique. Les dépenses publiques en matière d’éducation et de santé sont, elles aussi, loin en deçà de la moyenne des pays d’Afrique subsaharienne, alors que l’élite se remplit les poches. Le président Obiang Nguema est classé parmi les Africains les plus riches, selon le magazine américain Forbes. Quant à son fils, son possible successeur, après avoir défrayé la chronique en France et aux Etats-Unis pour son mode de vie luxueux et incompatible avec son salaire de ministre de 5 000 $, fait l’objet d’une instruction par la justice française dans le cadre de l’affaire dite des « biens mal acquis », visant le détournement de biens publics.
« Aujourd’hui, si la chute du prix du pétrole touche de plein fouet l’économie équato-guinéenne, c’est aussi à cause de l’absence totale de diversification de l’activité, déplore Lucas Fernandes. Le gouvernement a préféré investir dans des grands travaux tels que la construction des autoroutes, stades, hôtels, aéroport, nouvelles villes, nouvelle capitale plutôt que dans des secteurs durables tels que santé, éducation ou logements. Il y aurait quelque 800 projets en route, qui sont tous arrêtés à cause de la pénurie d’argent ! » « Malabo se trouve aujourd’hui dans une impasse et il n’est pas sûr qu’une élection présidentielle même remportée par le régime avec des résultats staliniens, puisse éviter à court terme une implosion à la Burkina Faso », ajoute l’expert de Transparency International, tout en rappelant que ses pronostics n’engagent que lui.
Source: Rfi.fr
En effet, l’enjeu du scrutin de dimanche n’est pas électoral, mais économique et politique. A cause de la chute des prix de l’essence depuis trois ans, l’économie de la Guinée équatoriale, qui est le troisième producteur du pétrole de l’Afrique subsaharienne après le Nigeria et l’Angola, est à l’arrêt. Le pays est entré en récession depuis 2013, avec un PIB de – 10, 2% enregistré en 2015, obligeant l’Etat équato-guinéen de suspendre les projets d’infrastructure gigantesques qu’il a lancés pour rattraper son retard.
« Avec un chômage qui frise quasiment 10% de la population, explique Lucas Olo Fernandes, chercheur spécialisé dans les pays de l’Afrique centrale à Transparency International, la situation sociale est explosive et le gouvernement craint que le mécontentement ne conduise au désordre et au chaos, comme cela s’est produit au Burkina Faso. D’où ce scrutin présidentiel anticipé qui permet au président Obiang Nguema de gagner du temps et attendre que le marché pétrolier se ressaisisse pour pouvoir préparer tranquillement sa succession. Depuis plusieurs années, il prépare son fils Teodorin, devenu le deuxième vice-président du pays, pour reprendre son relai, mais cette succession ne sera pas automatique, car le dauphin présumé a été inculpé en France dans les affaires de biens mal acquis. »
Autoritarisme et corruption
Doyen des chefs d’Etats africains par sa longévité au pouvoir, le président Obiang Nguema a pris les rênes de son pays en 1979, après avoir renversé par un coup d’Etat le gouvernement sanguinaire de son prédécesseur et « oncle » Francis Macias Nguema qu’il fera fusiller. Lui aussi, il a mis en place un régime autoritaire qui, pendant les 36 ans de son existence, a été régulièrement dénoncé par les organisations de défense des droits de l’homme pour sa répression des opposants, des organisations indépendantes de la société civile et des médias, ainsi que pour l’étendue de la corruption qui vaut à la Guinée équatoriale la 163e place sur 175 dans le rapport de l’ONG Transparency International.
La corruption a connu une ampleur inédite depuis que ce petit pays de 1 million d’habitants est devenu un pays pétrolier, avec la découverte du champ pétrolier de Zafiro en 1996. Avec une production de pétrole brut estimée aujourd’hui à autour de 400 000 barils/jour, l’économie équato-guinéenne s’est tournée au cours des deux dernières décennies vers l’exploitation d’hydrocarbures qui représentent 99% de ses exportations et 88,7% de son PIB, lequel a été multiplié par dix entre 1999 et 2009. Cela a fait de la Guinée équatoriale l’un des pays les plus riches de l’Afrique, avec le PIB par habitant le plus élevé du continent noir, plus proche de celui de la Grèce et de la Hongrie que celui de ses voisins de l’Afrique centrale.
Outre le pétrole, la Guinée équatoriale produit aussi du méthanol et du gaz naturel liquéfié. Or cette manne de matières premières ne profite guère à la majorité de la population qui vit sous le seuil de la pauvreté, avec moins de 2 dollars par jour. Selon les statistiques des organisations internationales, 70% de la population demeure pauvre, 33% de la population rurale dispose de l’eau potable et 43% de l’éclairage électrique. Les dépenses publiques en matière d’éducation et de santé sont, elles aussi, loin en deçà de la moyenne des pays d’Afrique subsaharienne, alors que l’élite se remplit les poches. Le président Obiang Nguema est classé parmi les Africains les plus riches, selon le magazine américain Forbes. Quant à son fils, son possible successeur, après avoir défrayé la chronique en France et aux Etats-Unis pour son mode de vie luxueux et incompatible avec son salaire de ministre de 5 000 $, fait l’objet d’une instruction par la justice française dans le cadre de l’affaire dite des « biens mal acquis », visant le détournement de biens publics.
« Aujourd’hui, si la chute du prix du pétrole touche de plein fouet l’économie équato-guinéenne, c’est aussi à cause de l’absence totale de diversification de l’activité, déplore Lucas Fernandes. Le gouvernement a préféré investir dans des grands travaux tels que la construction des autoroutes, stades, hôtels, aéroport, nouvelles villes, nouvelle capitale plutôt que dans des secteurs durables tels que santé, éducation ou logements. Il y aurait quelque 800 projets en route, qui sont tous arrêtés à cause de la pénurie d’argent ! » « Malabo se trouve aujourd’hui dans une impasse et il n’est pas sûr qu’une élection présidentielle même remportée par le régime avec des résultats staliniens, puisse éviter à court terme une implosion à la Burkina Faso », ajoute l’expert de Transparency International, tout en rappelant que ses pronostics n’engagent que lui.
Source: Rfi.fr
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