Dès le 15 septembre 2013, Digitale Afrique sera disponible gratuitement au format ebook et pdf en français et en anglais. digitalmcd.com
Comment caractérisiez-vous aujourd’hui l’état de lieu de la création numérique en Afrique ?
J’ai été assez agréablement surprise de découvrir beaucoup plus de profils, d’activités, d’initiatives que j’aurais imaginé à trouver. Je peux dire qu’il existe aujourd’hui un panel assez large et très diversifié d’initiatives autour du numérique en Afrique sachant que sur le continent on part de l’idée qu’un Africain sur deux n’a pas l’électricité. Et Internet est assez peu développé sur le continent d’une manière générale.
On connaît des peintres africains comme le Congolais Chéri Samba, des sculpteurs africains comme le Sénégalais Ousmane Sow, des photographes africains comme le Malien Seydou Keïta ou des cinéastes africains comme le Tchadien Mahamat Saleh Haroun. Pouvez-vous citer un créateur numérique africain très connu ?
Il y a le travail très original de Jean Katambayi Mukendi. C’est un jeune homme qui habite à Lubumbashi en République Démocratique du Congo. Il travaille beaucoup sur l’état de l’électricité et la desserte de l’énergie dans sa ville, mais aussi dans son pays. Il propose des machines assez originales faites de carton et d’électronique pour réguler l’électricité qui continue à faire dans sa ville de nombreux dégâts et d’incendies avec beaucoup de morts en raison d'installations très précaires. Jean a présenté il y a deux ans au Festival Mal au pixel à Paris son travail Pixelec, un réseau autour de la création numérique entre plusieurs pays… Il n’est pas extrêmement connu, mais on a beaucoup parlé de lui.
Sinon, vous avez quelqu’un qui vient du Cap de l’Afrique du Sud, James Webb. Il fait un grand nombre d’installations sonores. Il commence à être très connu. Il déplace des environnements sonores, par exemple des chants d’oiseaux migrateurs. Il fait des installations sonores dans des endroits très divers comme la muraille de Chine ou dans un musée à Johannesburg où il recrée des ambiances sonores venues d’autres endroits du monde et d’Afrique.
La création numérique en Afrique est-elle encore en gestation ?
Ce domaine est en plein développement, même si je n’aime pas le mot «développement» pour cela. Ça se cherche. Ce qui est intéressant, c’est que l’on trouve chez ces artistes une identité vraiment africaine dans beaucoup de travaux, dans le sens où l’on retrouve l’idée du partage et du faire ensemble.
Il y a surtout la volonté de ne plus copier l’Occident, mais de proposer des choses spécifiques et surtout – en parlant d’innovation technologique – de proposer des solutions pour les populations locales, donc des choses qui sont utiles, accessibles à tous, dans l’idée de l’open source et du partage et qui aident véritablement les populations à mieux vivre, à mieux survivre.
En Afrique, le taux de pénétration du réseau Internet filaire est le plus faible du monde avec 15,6 % en juin 2012. Le taux de pénétration des technologies mobiles se situe aujourd’hui à 40 %. Le coût de connexion à Internet en Afrique subsaharienne demeure le plus cher du monde. Peut-on dire que sans connexion à Internet, il n’y pas de création numérique possible ?
Non, je ne dirais pas cela, parce qu’il y a beaucoup d’ateliers autour de l’électronique qui se mettent en place, tout ce qui est FabLab [de l’anglais FABrication LABoratory, laboratoire de fabrication, ndlr] et d’autres qui se développent un peu partout. Il y a effectivement des initiatives qui peuvent s’en passer.
Votre carte, publiée dans mcd, montre plusieurs « Afriques » digitales : le Maghreb, l’Afrique de l’Ouest, le Kenya à l’Est et surtout l’Afrique du Sud. Est-ce que Johannesburg est aujourd’hui la capitale africaine de la création numérique ?
On peut effectivement dire cela. En même temps, cela m’embête un peu de dire ça, parce que je n’ai pas envie de mettre en avant une zone plutôt qu’une autre. Mais dans les faits, on voit effectivement une majorité d’initiatives dans ce coin-là de l’Afrique.
Quelle est aujourd’hui la place de l’Afrique numérique sur la carte mondiale ?
C’est vraiment en pleine effervescence, et encore peu interconnecté, mais c’était cela aussi l’intérêt de cet ouvrage. Avec le développement de la téléphonie mobile, l’Afrique prend une place importante au niveau de la création et la diversité, mais certainement bien moins représentatif qu’en Occident, l’Europe ou même l’Asie avec un pôle assez important en Indonésie. Les mentalités sont très différentes et les besoins aussi. Donc je dirais que l’Afrique n’est pas négligeable dans son «développement» à ce niveau-là, mais certainement pas prépondérant aujourd’hui, pas encore du moins.
Lors de la présentation du numéro spécial Digitale Afrique à Paris, il y avait la présence de trois créateurs tunisiens qui travaillent tous aussi en France. Est-ce que pour un créateur numérique africain, la France ou l’Europe reste un passage obligatoire pour réussir, se faire connaître ou se développer ?
Je ne dirais pas cela comme ça. Quand un artiste commence à être connu ou commence à être invité dans des stages ou des festivals en Europe, c’est sûr qu’il a une facilité plus grande à voyager par la suite, et il a accès à des technologies, des infrastructures, du
matériel et des formations qui ne sont pas forcément en place en Afrique.
Vous dites « La Révolution en Afrique, elle sera, elle est déjà, numérique ». Est-ce que cette révolution est en marche ?
C’est pour dire que le numérique en Afrique est à la fois une solution et à la fois un enjeu de développement. Il y a un certain nombre de projets qui permettent au niveau du continent de mettre en place des solutions, que ce soit au niveau de la circulation de l’information comme le réseau www.ushahidi.com [société basée à Nairobi, Kenya, spécialisée dans le développement de logiciels libres, ndlr] par exemple, qui va dans le sens d’une certaine démocratisation de l’information, d’un partage des savoirs et de l’information. C’est une révolution dans le sens d’une ouverture. Dans la plupart des projets présentés dans la revue, on retrouve cette identité africaine et l’idée du partage et du faire ensemble.
Source : Rfi.fr
J’ai été assez agréablement surprise de découvrir beaucoup plus de profils, d’activités, d’initiatives que j’aurais imaginé à trouver. Je peux dire qu’il existe aujourd’hui un panel assez large et très diversifié d’initiatives autour du numérique en Afrique sachant que sur le continent on part de l’idée qu’un Africain sur deux n’a pas l’électricité. Et Internet est assez peu développé sur le continent d’une manière générale.
On connaît des peintres africains comme le Congolais Chéri Samba, des sculpteurs africains comme le Sénégalais Ousmane Sow, des photographes africains comme le Malien Seydou Keïta ou des cinéastes africains comme le Tchadien Mahamat Saleh Haroun. Pouvez-vous citer un créateur numérique africain très connu ?
Il y a le travail très original de Jean Katambayi Mukendi. C’est un jeune homme qui habite à Lubumbashi en République Démocratique du Congo. Il travaille beaucoup sur l’état de l’électricité et la desserte de l’énergie dans sa ville, mais aussi dans son pays. Il propose des machines assez originales faites de carton et d’électronique pour réguler l’électricité qui continue à faire dans sa ville de nombreux dégâts et d’incendies avec beaucoup de morts en raison d'installations très précaires. Jean a présenté il y a deux ans au Festival Mal au pixel à Paris son travail Pixelec, un réseau autour de la création numérique entre plusieurs pays… Il n’est pas extrêmement connu, mais on a beaucoup parlé de lui.
Sinon, vous avez quelqu’un qui vient du Cap de l’Afrique du Sud, James Webb. Il fait un grand nombre d’installations sonores. Il commence à être très connu. Il déplace des environnements sonores, par exemple des chants d’oiseaux migrateurs. Il fait des installations sonores dans des endroits très divers comme la muraille de Chine ou dans un musée à Johannesburg où il recrée des ambiances sonores venues d’autres endroits du monde et d’Afrique.
La création numérique en Afrique est-elle encore en gestation ?
Ce domaine est en plein développement, même si je n’aime pas le mot «développement» pour cela. Ça se cherche. Ce qui est intéressant, c’est que l’on trouve chez ces artistes une identité vraiment africaine dans beaucoup de travaux, dans le sens où l’on retrouve l’idée du partage et du faire ensemble.
Il y a surtout la volonté de ne plus copier l’Occident, mais de proposer des choses spécifiques et surtout – en parlant d’innovation technologique – de proposer des solutions pour les populations locales, donc des choses qui sont utiles, accessibles à tous, dans l’idée de l’open source et du partage et qui aident véritablement les populations à mieux vivre, à mieux survivre.
En Afrique, le taux de pénétration du réseau Internet filaire est le plus faible du monde avec 15,6 % en juin 2012. Le taux de pénétration des technologies mobiles se situe aujourd’hui à 40 %. Le coût de connexion à Internet en Afrique subsaharienne demeure le plus cher du monde. Peut-on dire que sans connexion à Internet, il n’y pas de création numérique possible ?
Non, je ne dirais pas cela, parce qu’il y a beaucoup d’ateliers autour de l’électronique qui se mettent en place, tout ce qui est FabLab [de l’anglais FABrication LABoratory, laboratoire de fabrication, ndlr] et d’autres qui se développent un peu partout. Il y a effectivement des initiatives qui peuvent s’en passer.
Votre carte, publiée dans mcd, montre plusieurs « Afriques » digitales : le Maghreb, l’Afrique de l’Ouest, le Kenya à l’Est et surtout l’Afrique du Sud. Est-ce que Johannesburg est aujourd’hui la capitale africaine de la création numérique ?
On peut effectivement dire cela. En même temps, cela m’embête un peu de dire ça, parce que je n’ai pas envie de mettre en avant une zone plutôt qu’une autre. Mais dans les faits, on voit effectivement une majorité d’initiatives dans ce coin-là de l’Afrique.
Quelle est aujourd’hui la place de l’Afrique numérique sur la carte mondiale ?
C’est vraiment en pleine effervescence, et encore peu interconnecté, mais c’était cela aussi l’intérêt de cet ouvrage. Avec le développement de la téléphonie mobile, l’Afrique prend une place importante au niveau de la création et la diversité, mais certainement bien moins représentatif qu’en Occident, l’Europe ou même l’Asie avec un pôle assez important en Indonésie. Les mentalités sont très différentes et les besoins aussi. Donc je dirais que l’Afrique n’est pas négligeable dans son «développement» à ce niveau-là, mais certainement pas prépondérant aujourd’hui, pas encore du moins.
Lors de la présentation du numéro spécial Digitale Afrique à Paris, il y avait la présence de trois créateurs tunisiens qui travaillent tous aussi en France. Est-ce que pour un créateur numérique africain, la France ou l’Europe reste un passage obligatoire pour réussir, se faire connaître ou se développer ?
Je ne dirais pas cela comme ça. Quand un artiste commence à être connu ou commence à être invité dans des stages ou des festivals en Europe, c’est sûr qu’il a une facilité plus grande à voyager par la suite, et il a accès à des technologies, des infrastructures, du
matériel et des formations qui ne sont pas forcément en place en Afrique.
Vous dites « La Révolution en Afrique, elle sera, elle est déjà, numérique ». Est-ce que cette révolution est en marche ?
C’est pour dire que le numérique en Afrique est à la fois une solution et à la fois un enjeu de développement. Il y a un certain nombre de projets qui permettent au niveau du continent de mettre en place des solutions, que ce soit au niveau de la circulation de l’information comme le réseau www.ushahidi.com [société basée à Nairobi, Kenya, spécialisée dans le développement de logiciels libres, ndlr] par exemple, qui va dans le sens d’une certaine démocratisation de l’information, d’un partage des savoirs et de l’information. C’est une révolution dans le sens d’une ouverture. Dans la plupart des projets présentés dans la revue, on retrouve cette identité africaine et l’idée du partage et du faire ensemble.
Source : Rfi.fr
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