Académiquement bien estampillée, la thèse post-islamiste semble se confirmer dans les révoltes qui continuent de secouer le monde arabe. Ces mouvements de contestation non contrôlés, nous dit- on, est l’œuvre d’une génération face-book, sans lien organique avec les tendances islamistes. L’idée fait sans doute écho à la thèse d’Olivier Roy, corroborée par Gilles Kepel, selon laquelle l’islamisme est bel et bien mort de sa confrontation avec les régimes autoritaires et des tensions qu’il éprouve face à la modernité. Selon le chantre de l’échec de l’islam politique, « L'islamisme est fini, comme solution politique et comme idéologie. Mais les islamistes sont là, et c'est donc la grande inconnue.» A l’en croire Penda Mbow, ces « mutations » doivent beaucoup au combat mené par des intellectuels, notamment des féministes, qui ont su convaincre de la nécessité de reconnaitre la neutralité de l’Etat par rapport à la religion. Refusant de faire feu de tout bois, elle pronostique en faveur des femmes qu’elles jugent mieux à mêmes de chaperonner cette grande œuvre révolutionnaire.
Pourtant rien n’est moins évident que l’absence des mouvements islamistes dans les manifestations qui ont provoqué la chute des régimes autoritaires arabes. Les témoignages de Gilbert Achar et de Patrick Haenni pour le cas de l’Egypte, révèle suffisamment le rôle « significatif » que fut celui des Frères musulmans. Tous les deux ont respectivement retracé dans le Monde diplomatique du mois de mars et sur oumma.com les étapes qui ont marqué l’intervention des islamistes et leur option pour « une transition dans l’ordre », telle que prônée par les Etats-Unis et conformément à leur orientation idéologique. On semble par ailleurs ignorer les interventions télévisées de l’un des plus grands savants égyptiens, Youssouf Qaradawi, l’intervention d’une partie des savants de l’institut AL Azhar et le symbole du vendredi dans l’imaginaire des citoyens qui, bien que sécularisés, n’en demeurent pas moins attachés à leur religion.
Les pays arabes donnent l’impression d’avoir basculé tous et d’un seul trait dans le camp de la modernité politique. Ce nouveau tournant va rompre, aux yeux des tenants du post-islamisme, avec le face à face entre autoritarisme et islamisme pour devenir un combat démocratique. Le discours et la nouvelle posture des leaders islamistes confortent cette attente à l’instar de Rached Ghanouchi qui déclare ne pas être candidat aux prochaines élections présidentielles. L’islamisme turc est présenté comme le modèle toléré dont les figures de l’islam politique devront s’accommoder pour être en phase avec les principes démocratiques. On se soucie moins de savoir ce que ces derniers pensent ou comptent faire après que ce vent de liberté aura fini de dévoiler toutes les options envisageables. Cette tendance visant à disqualifier les islamistes est sujette à de sérieuses réserves et emprunte, à bien des égards, les contours de la simplification et des raccourcis.
Estimée à 20% par Olivier Roy et à 30% par Tariq Ramadan, la force des islamistes dans les pays en ébullition ne saurait échapper à la vigilance des spécialistes dignes de ce nom. Le militantisme l’emportant sur l’analyse, l’on fait fi de ce paramètre oh combien déterminant. C’est d’ailleurs avec beaucoup d’ironie que le leader de la section féminine de l’islamisme marocain, Nadia Yassine aborde la faible représentativité des partis politiques de son pays. Silencieuse sur le nombre de militants que compte le mouvement Justice et Spiritualité, pour des raisons de sécurité, elle envisage une réforme en douceur plutôt que des « césariennes historiques ». Ce raisonnement a guidé l’intervention des mouvements islamistes qui s’inscrit en droite ligne de la théologie d’un classique comme le Cheikh ibn Tayimiyya.
Par rapport au succès relatif du modèle turc qui semble emporter l’enthousiasme de tant d’observateurs, les leaders islamistes rappellent les spécificités qui caractérisent leur contexte sans cacher leur admiration à l’égard de leurs frères. Ni Nadia Yassine, ni Rachid Ghanouchi, encore moins Jamil Mansour ne se figurent le cas turc comme « un modèle clé en main », pour reprendre la figure de proue des sœurs marocaines.
A la différence de beaucoup d’autres spécialistes, François Burgat et Vincent Geisser considèrent que le prisme déformant du discours a depuis très longtemps trahi la vérité des faits. En témoigne l’interminable débat et les nombreuses publications consacrées à Tariq Ramadan. Règle de méthode, Burgat invite ses collèges à se rapprocher davantage des islamistes, de consulter leur bibliothèque au lieu de se limiter à leurs déclarations. Jean François Bayart n’hésite pas dans son ouvrage intitulé l’islam républicain, de traiter le Premier ministre turc de « redoutable animal politique » pour son habilité à surfer aussi bien sur le registre nationaliste que celui de l’islam.
L’on se tromperait nous mêmes sur les raisons de ces travers en les imputant à un défaut de rigueur scientifique. Leur persistance est révélatrice d’un engagement pour une vision autrement plus idéologique que l’idéologie qu’il s’agit de saper.
On est davantage persuadé du poids des rapports de force politico-économiques sur les recherches scientifiques largement tributaires des paradigmes forgés à partir de l’occident. Les média ne pouvant pas, pour des raisons objectives, nous aider à sortir de ce carcan, l’heure de vérité semble encore trop éloignée pour qu’on puisse escompter de ce vent de liberté un meilleur traitement des questions liées à l’islam et à l’islamisme. Le passif intellectuel est suffisamment lourd pour que les chercheurs et autres spécialistes prennent conscience du déni de justice qu’ils pratiquent à l’égard de leur objet d’étude.
Pourtant rien n’est moins évident que l’absence des mouvements islamistes dans les manifestations qui ont provoqué la chute des régimes autoritaires arabes. Les témoignages de Gilbert Achar et de Patrick Haenni pour le cas de l’Egypte, révèle suffisamment le rôle « significatif » que fut celui des Frères musulmans. Tous les deux ont respectivement retracé dans le Monde diplomatique du mois de mars et sur oumma.com les étapes qui ont marqué l’intervention des islamistes et leur option pour « une transition dans l’ordre », telle que prônée par les Etats-Unis et conformément à leur orientation idéologique. On semble par ailleurs ignorer les interventions télévisées de l’un des plus grands savants égyptiens, Youssouf Qaradawi, l’intervention d’une partie des savants de l’institut AL Azhar et le symbole du vendredi dans l’imaginaire des citoyens qui, bien que sécularisés, n’en demeurent pas moins attachés à leur religion.
Les pays arabes donnent l’impression d’avoir basculé tous et d’un seul trait dans le camp de la modernité politique. Ce nouveau tournant va rompre, aux yeux des tenants du post-islamisme, avec le face à face entre autoritarisme et islamisme pour devenir un combat démocratique. Le discours et la nouvelle posture des leaders islamistes confortent cette attente à l’instar de Rached Ghanouchi qui déclare ne pas être candidat aux prochaines élections présidentielles. L’islamisme turc est présenté comme le modèle toléré dont les figures de l’islam politique devront s’accommoder pour être en phase avec les principes démocratiques. On se soucie moins de savoir ce que ces derniers pensent ou comptent faire après que ce vent de liberté aura fini de dévoiler toutes les options envisageables. Cette tendance visant à disqualifier les islamistes est sujette à de sérieuses réserves et emprunte, à bien des égards, les contours de la simplification et des raccourcis.
Estimée à 20% par Olivier Roy et à 30% par Tariq Ramadan, la force des islamistes dans les pays en ébullition ne saurait échapper à la vigilance des spécialistes dignes de ce nom. Le militantisme l’emportant sur l’analyse, l’on fait fi de ce paramètre oh combien déterminant. C’est d’ailleurs avec beaucoup d’ironie que le leader de la section féminine de l’islamisme marocain, Nadia Yassine aborde la faible représentativité des partis politiques de son pays. Silencieuse sur le nombre de militants que compte le mouvement Justice et Spiritualité, pour des raisons de sécurité, elle envisage une réforme en douceur plutôt que des « césariennes historiques ». Ce raisonnement a guidé l’intervention des mouvements islamistes qui s’inscrit en droite ligne de la théologie d’un classique comme le Cheikh ibn Tayimiyya.
Par rapport au succès relatif du modèle turc qui semble emporter l’enthousiasme de tant d’observateurs, les leaders islamistes rappellent les spécificités qui caractérisent leur contexte sans cacher leur admiration à l’égard de leurs frères. Ni Nadia Yassine, ni Rachid Ghanouchi, encore moins Jamil Mansour ne se figurent le cas turc comme « un modèle clé en main », pour reprendre la figure de proue des sœurs marocaines.
A la différence de beaucoup d’autres spécialistes, François Burgat et Vincent Geisser considèrent que le prisme déformant du discours a depuis très longtemps trahi la vérité des faits. En témoigne l’interminable débat et les nombreuses publications consacrées à Tariq Ramadan. Règle de méthode, Burgat invite ses collèges à se rapprocher davantage des islamistes, de consulter leur bibliothèque au lieu de se limiter à leurs déclarations. Jean François Bayart n’hésite pas dans son ouvrage intitulé l’islam républicain, de traiter le Premier ministre turc de « redoutable animal politique » pour son habilité à surfer aussi bien sur le registre nationaliste que celui de l’islam.
L’on se tromperait nous mêmes sur les raisons de ces travers en les imputant à un défaut de rigueur scientifique. Leur persistance est révélatrice d’un engagement pour une vision autrement plus idéologique que l’idéologie qu’il s’agit de saper.
On est davantage persuadé du poids des rapports de force politico-économiques sur les recherches scientifiques largement tributaires des paradigmes forgés à partir de l’occident. Les média ne pouvant pas, pour des raisons objectives, nous aider à sortir de ce carcan, l’heure de vérité semble encore trop éloignée pour qu’on puisse escompter de ce vent de liberté un meilleur traitement des questions liées à l’islam et à l’islamisme. Le passif intellectuel est suffisamment lourd pour que les chercheurs et autres spécialistes prennent conscience du déni de justice qu’ils pratiquent à l’égard de leur objet d’étude.
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