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Sénégal – élections locales Saint louis : une bataille qui risque d’être fratricide

A moins de quarante-huit heures de la date du 22 mars sanctionnant le démarrage officiel du vote pour les élections locales, la campagne bat son plein à Saint-Louis. Au rythme des mélodies d’ambiance fusant de toutes parts, des visites de proximité effectuées par les principaux tenants des listes en lice, voire de petits meetings de quartier ou autres processions, l’ancienne capitale sénégalaise à la platitude morne vibre sous les ultimes lampions d’une campagne qui a atteint sa dernière ligne droite. Une ultime phase marquée par des affrontements violents entre adversaires, qui semblent exprimer l’âpreté de la lutte opposant les cinq listes en quête de la mairie et du Conseil régional de Saint-Louis, et surtout révélateurs des enjeux énormes que recoupent ces élections locales dans la vieille ville, classée patrimoine mondial mais si fragilisée.



L'ancienne capitale sénégalaise qui va vivre l'une des élections les plus disputées de son histoire (Photo: www.routard.com/)
L'ancienne capitale sénégalaise qui va vivre l'une des élections les plus disputées de son histoire (Photo: www.routard.com/)
La fin de la campagne pour les élections locales, à Saint-Louis, a coïncidé hier, jeudi, avant-dernier jour de mobilisation politique, en un tassement des énergies avant l’ultime jaillissement d’aujourd’hui, vendredi 20 mars, journée des meetings de clôture pour les principales listes en compétition dans ces joutes municipales, régionales et rurales. La ville de Saint-Louis a été ainsi sillonnée de long en large par les convois des leaders politiques, dans une ambiance de folklore rythmée par la musique d’ambiance et les annonces sorties des mégaphones. Mais point de meetings d’envergure. Les visites de proximité dans les principaux quartiers de la vieille ville se sont jointes à de petites esquisses de mobilisation politique, tentées de part et d’autre des listes en compétition par des responsables pour revigorer l’ardeur militante des partisans avant l’assaut final du 22 mars. Le marché de Sor, le quartier des Hlm ou celui de Diamaguène ont ainsi vu défiler à leurs alentours différents responsables investis ou chefs de coalitions comme Ousmane Masseck Ndiaye ou Cheikh Bamba Dièye en visite de proximité. Comme si les ardeurs se préservaient pour la journée d’aujourd’hui, dernier jour officiel de campagne.

Paradoxalement, cette journée morne d’hier semblait déparer d’avec la montée brusque de la tension entre adversaires politiques constatée ces derniers temps à Saint-Louis. Alors que les ténors des principales listes en compétition rivalisaient d’ardeur et de mordacité pour décrier leurs adversaires, les échauffourées se multipliaient dangereusement entre partisans des différentes coalitions en lice. La dernière semaine de la campagne a connu ainsi des cas significatifs de violence électorale ayant sidéré pas mal de Saint-Louisiens qui se sont demandés alors où était la retenue légendaire des habitants de la vieille ville. Au cours du week-end, des gardes du corps d’Ousmane Masseck Ndiaye, le maire sortant, et de Cheikh Bamba Dieye de la coalition Benno Siggil Senegaal s’affrontaient en effet dans une guérilla ouverte, sur la corniche de l’île, occasionnant des blessés dans les deux camps. Pour ne guère apaiser la tension, la violence refaisait surface mardi à Guet Ndar (Langue de barbarie) quand les partisans de Masseck Ndiaye et Ameth Fall Baraya ont eu des accrochages violents, à hauteur du domicile de ce dernier, faisant de sérieux dégâts. Des armes blanches furent sorties, un pistolet aperçu alors même que la voiture de Mame Fatou Kaïré de la liste Sopi 2009 était saccagée. Pis, ces accrochages ont dégénéré mercredi en des affrontements extrêmement violents, symptomatiques de l’âpreté de la lutte qui oppose les coalitions en lice pour les élections locales à Saint-Louis. Une ville pourtant en proie à des contraintes drastiques d’assainissement, d’éclairage public, de réhabilitation du mythique Pont Faidherbe, de désengorgement des marchés dont en premier lieu celui de Sor, de fragilisation du système éducatif communal avec des écoles menacées d’effondrement pour cause de vétusté, voire de prise en charge médicale largement déficiente…

Cinq listes en compétition pour la mairie et le Conseil régional

Trois coalitions et deux partis politiques briguent les suffrages des Saint-Louisiens pour les élections locales de dimanche. La coalition Sopi 2009 est pilotée par Ousmane Masseck Ndiaye qui cherche à rempiler à la tête de la mairie de Saint-Louis et Aliou Niang pour le Conseil régional. A côté d’elle, on retrouve la coalition Beenno Ligeey Senegaal qui regroupe la Ligue démocratique (LD), le Parti de l’indépendance et du travail (PIT), le Jëf Jël, le Front pour le socialisme et la démocratie-Benno Jubël (FSD-BJ) et l’Alliance pour la République (APR). Cette coalition a choisi pour conquérir la mairie avec Cheikh Bamba Dièye (FSD-BJ) à la tête de la liste majoritaire et pour la proportionnelle Me Alioune Badara Cissé. Aissata Tall Sall du Parti socialiste dirige, quant à elle, la liste pour le Conseil régional. La troisième coalition « And dekkal Ndar ngir askan wi » a investi pour sa part le libéral Ameth Fall Braya pour la mairie et le représentant de Rewmi Abdoulaye Ndoye pour le Conseil régional. La quête des suffrages pour les élections locales à Saint-Louis a aussi mobilisé les forces de deux partis dont les listes sont dirigées par Me Alioune Abatalib Guèye pour la Convergence pour une nouvelle citoyenneté et par Babacar Ndiaye Khadim pour le Parti de la vérité concertée (PCV-SA).

Des grosses pointures …


Concurrents directs lors des dernières élections locales, le maire sortant Ousmane Masseck Ndiaye, de la Coalition Sopi 2009, et son camarade de parti Ahmet Fall Braya se retrouvent une fois encore challengers pour le fauteuil de maire de Saint-Louis. Ayant battu son principal adversaire avec une large avance en 2002. le maire sortant entend rééditer son coup, sur la base des réalisations opérées au cours de son mandat et de son programme de développement de la vieille ville. La tête de liste majoritaire de la coalition Sopi 2009 à Saint-Louis, en conférence de presse mercredi 18 mars, a promis dans cette optique une équipe de rupture pour diriger la future équipe municipale avec des gens de la société civile qui vont mettre leurs compétences au service de la ville sans aucune considération politicienne.

Ameth Fall Braya, leader de la coalition « And dekkal Ndar ngir askan wi » et par ailleurs Pca du Conseil sénégalais des chargeurs, cherche quant à lui à prendre sa revanche. Adversaire certainement le plus sérieux du maire sortant, le député libéral n’a ménagé aucun effort pour s’emparer de la mairie de Saint-Louis. Cet affrontement fratricide entre libéraux semble à coup sûr le paradoxe le plus marquant des élections locales du 22 mars dans la vieille ville, tant il est par ailleurs vrai que l’avenir politique de ces ténors se joue dans ces joutes. Car, si Ousmane Masseck Ndiaye perd son fauteuil de maire, ses adversaires politiques qui contestent son leadership au sein même du Pds, auront plus de volonté à lui ravir la conduite du parti libéral à Saint-Louis. Pour éviter ce cas de figure, M. Ndiaye mise sur la force du Pds dans la vieille ville quand bien même d’autres ténors libéraux comme Ousmane Ngom, restent tapis dans l’ombre, dans l’attente d’une déconvenue du maire sortant pour booster leurs ambitions politiques pour Saint-Louis. Des ambitions noyées dans l’œuf par la machine implacable du parti régie par la main de fer du Président Wade. Le député Ahmet Fall Braya joue également gros dans ce bras de fer. Si la coalition Sopi 2009 gagne ces Locales, l’adversaire direct de Masseck Ndiaye ne serait pas loin de la mort politique. Ses « frères » du parti libéral qui lui reprochent déjà d’avoir créé une liste parallèle et d’avoir pactisé avec leurs ennemis, seraient tout disposés à le « détruire ». Cette épée de Damoclès suspendue au dessus de sa tête ne semble cependant point ébranler Ahmet Fall qui a pris, en vérité, soin d’assurer ses arrières. Tête de liste proportionnelle de la coalition « And liguey Sénégal dékal ngor ngir askanwi », le député libéral est sûr d’être conseillé municipal. Ce qui lui offre la possibilité de déposer sa candidature au poste de maire.
Aux faire-valoir

Ce cas de figure est loin d’être portant celui de Cheikh Bamba Dièye. Pour certains observateurs, le chef du FSD-BJ aurait fait un mauvais choix en optant pour la liste majoritaire de la coalition Benno Siggil Senegaal. Cheikh Bamba Dièye aurait eu davantage de chance de devenir maire de Saint-Louis, s’il était sur la liste proportionnelle. Car, s’il ne gagne pas la majorité, il passera irrémédiablement à la trappe. Pis, en cas de déconvenue, il ne serait même pas un simple conseiller municipal. On mesure alors à quel point la tâche du leader du FSD-BJ est ardue, car il lui faudra assurer la gagne face aux têtes de liste majoritaire des trois autres coalitions en lice : Masseck Ndiaye (coalition Sopi 2009), Alioune Abatalib Guèye de la Convergence pour une Nouvelle Citoyenneté (Cnn) et Déthié Fall (coalition And liguey Sénégal dékal Ndar ngir askanwi). Les chances de ces deux derniers leaders tout comme celle d’Alioune Badara Cissé de l’APR Yakaar, qui dirige la liste proportionnelle de la coalition Benno Siggil Senegaal, restent à dire vrai limitées. Novices pour leur plupart quant aux mandats qu’ils briguent, ces acteurs politiques manquent de base solide pouvant leur permettre de rivaliser avec les autres ténors en lice. C’est dire à quel point la bataille pour les élections locales à Saint-Louis risque d’être un duel ouvert entre frères libéraux, à moins qu’un troisième larron ne surgisse en la personne de Cheikh Bamba Dièye pour bousculer la hiérarchie pré-établie. Compte tenu surtout de l’énorme crédit et du capital de confiance que les Saint-Louisiens semblent témoigner envers cet authentique fils, voire de la désaffection des électeurs envers le mode de gestion libérale du pays.

Moctar Dieng (Sud)

Vendredi 20 Mars 2009 - 00:35


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