Vous êtes l’une des ex-otages retenus au Radisson Blu de Bamako par des terroristes. Pouvez-vous nous dire comment cela s’est-il passé ?
Aux environs de 7h30 du matin, nous avons entendu des coups de feu, et j’ai été aussitôt contactée par une collègue qui m’a confirmé que nous étions attaqués, et par l’officier de sécurité (Didier le policier français) et l’Administrateur (ndlr : Adama Ouane). Ces derniers nous ont demandé de suivre les consignes : rester calmes, se cacher le plus possible et s’éloigner des fenêtres. C’est ce que j’ai fait. L’attente a été très longue, puisqu’elle a duré de 7h15 du matin jusqu’aux environs de 16 h, heure à laquelle j’ai été libérée. Nous nous contactions sans cesse par sms et je dois dire que côté sénégalais, le colonel Abdou Fall qui est chef de la mission militaire m’appelait toutes les trente minutes pour me rassurer et me donner des informations. Donc je tiens à le saluer.
Recluse seule dans votre chambre mais véritablement prise en charge par la cellule de crise ?
Nous étions prises en charge par texto et par téléphone. Cela nous aura beaucoup aidées parce que dans ces conditions, où nous sommes seules dans nos chambres, nous paniquons. Mais je dois dire que nous avons été très aidées.
Vers 16h, c’est un officier malien du nom d’Ismaël Fall qui vous exfiltre. Que voulez-vous lui dire ?
Ismaël, grâce à toi, nous avons pu sortir saine et sauve. Mes collègues m’ont également dit que c’est toi qui les as extraites et nous tenons à te remercier. Tu m’as rassurée et c’est pourquoi j’ai eu le courage d’ouvrir la porte. Merci Ismaël.
Durant ces heures de terreur et d’angoisse, pendant que cela tirait de partout, vous avez pourtant gardé votre foi et votre calme.
C’est vrai. Paniquer n’arrange rien, ce n’est pas la solution. J’ai beaucoup prié, énormément prié, et puis j’ai pensé à mon fils, que j’ai enterré il y a une semaine. Je crois que c’est lui qui a été notre étoile, c’est lui qui nous as protégées parce que le mot de passe, le code de sécurité, était « Yohann » et dans Yohann il y a Yann. Donc je suis persuadée qu’il a été notre étoile.
Yann que vous avez enterré la semaine dernière. Et vous avez aussitôt repris le travail. On voit sur votre page Facebook que vous êtes très active. Chaque fois que vous allez en mission, vous visitez et prenez toujours en photo les lieux de culte chrétiens.
J’ai toujours eu la foi et je l’aurai toujours parce dans les moments joyeux comme dans les moments difficiles, la foi aura toujours été présente. Je rends grâce à Dieu. Je rends grâce à la Vierge Marie. Elle nous a toujours aidés à nous relever. J’ai confiance en elle. La preuve, nous sommes là aujourd’hui à nous entretenir malgré les événements de Bamako.
Vous êtes la petite-nièce de Léopold Sédar Senghor, vous avez eu une vie privilégiée qui n’incite pas vraiment à cette foi profonde. Votre vie a cependant été marquée par beaucoup de drames. Vous n’en faites pas montre. D’où tenez-vous ce stoïcisme, cette foi, ce courage, car même en allant chercher le corps de Yann à Montréal vous avez continué vos activités sur Facebook, publiant les photos de l’oratoire Saint-Joseph où une messe venait d’être dite en sa mémoire
Je reconnais que j’ai pris cela de ma mère. Maman était une femme très croyante, pieuse, très forte. Et je crois que lui ressemble énormément. La prière a toujours été mon secours et mon réconfort. Et je continuerai à prier.
Durant ces heures de prise d’otage, vous étiez recluse dans votre chambre d’hôtel, vous receviez des instructions, qu’entendiez-vous dehors en ce moment-là ?
J’ai entendu des coups de feu, j’ai entendu des cris, des meubles qui bougeaient, Nous avons tout entendu, mais j’ai essayé de garder mon calme, de ne pas paniquer parce que paniquer dans ce genre de situation ne rend pas service. Mais j’ai beaucoup prié, beaucoup, beaucoup prié.
Au début, vous aviez pensé que c’étaient des portes qui claquaient dites-vous ?
En effet, aux premiers bruits, j’ai cru que c’étaient des portes qui claquaient. Et comme cela continuait, aussitôt ma collègue m’a appelé, elle m’a dit « tu as entendu, ce sont des coups de feu ». Je lui dis « oui ». Elle m’a dit « j’ai peur », je lui dis « moi aussi, mais ça ira ». J’ai appelé l’officier de sécurité et l’Administrateur et ils nous ont donné des consignes que nous avons suivies. Et je dois dire qu’au niveau de Paris, la Secrétaire Générale et toute son équipe n’ont pas arrêté de nous soutenir, de nous rassurer. Nous avons été très, très, soutenues. C’était très important et je tenais à remercier la Secrétaire Générale et toute l’équipe de la Francophonie. Je suis sortie la dernière et je me souviens lorsque je l’a i appelée au téléphone pour la rassurer, c’était des applaudissements de tous mes collègues et cela m’a fait chaud au cœur.
Savez-vous Elisabeth qu’aussi bien à Dakar qu’à Paris, vos amis ont pensé à vous très fortement parce que vous portez le deuil de votre fils Yann ?
C’est vrai qu’il y a eu une vraie chaîne de solidarité et de prières, de mes amis, de mes collègues, de ma famille. C’est pour eux que j’ai lutté et que je continuerai de lutter, parce que je n’ai pas le droit de baisser les bras. L’Ambassadeur du Canada à Bamako nous a merveilleusement reçus et entourés. Et je me souviens de ses mots au moment de nous quitter : « regardez devant vous, il y a des gens qui vous aiment ». Nous regarderons devant nous et nous tiendrons compte des gens qui nous aiment. Le fait que les gens pensaient à nous durant les événements m’a beaucoup touchée et cela a renforcé ma foi.
Quelles étaient vos pensées pendant ces longues heures où vous étiez en survie ?
J’ai pensé à Yann, à Cyril (ndlr : son second fils), Olivier, Patrick, Jean-Philippe (ndlr : ses neveux). J’ai dit « Yann, tu es parti mais moi je ne veux pas partir maintenant. Il faut que tu m’aides pour m’en sortir ». Et j’ai prié. J’étais convaincue que j’allais m’en sortir, que nous allions nous en sortir. Et c’est ce qui est arrivé.
Vous avez malheureusement perdu un collègue, le Belge Geoffrey Dieudonné, membre de l’Assemblée Parlementaire Francophone, mort sous les balles des terroristes.
C’est malheureusement au stade où nous étions regroupés que j’ai appris l’information. Geoffrey était jeune, avec une femme et des enfants. Il était descendu pour prendre son petit-déjeuner et il s’est retrouvé face aux terroristes.
DMF
Aux environs de 7h30 du matin, nous avons entendu des coups de feu, et j’ai été aussitôt contactée par une collègue qui m’a confirmé que nous étions attaqués, et par l’officier de sécurité (Didier le policier français) et l’Administrateur (ndlr : Adama Ouane). Ces derniers nous ont demandé de suivre les consignes : rester calmes, se cacher le plus possible et s’éloigner des fenêtres. C’est ce que j’ai fait. L’attente a été très longue, puisqu’elle a duré de 7h15 du matin jusqu’aux environs de 16 h, heure à laquelle j’ai été libérée. Nous nous contactions sans cesse par sms et je dois dire que côté sénégalais, le colonel Abdou Fall qui est chef de la mission militaire m’appelait toutes les trente minutes pour me rassurer et me donner des informations. Donc je tiens à le saluer.
Recluse seule dans votre chambre mais véritablement prise en charge par la cellule de crise ?
Nous étions prises en charge par texto et par téléphone. Cela nous aura beaucoup aidées parce que dans ces conditions, où nous sommes seules dans nos chambres, nous paniquons. Mais je dois dire que nous avons été très aidées.
Vers 16h, c’est un officier malien du nom d’Ismaël Fall qui vous exfiltre. Que voulez-vous lui dire ?
Ismaël, grâce à toi, nous avons pu sortir saine et sauve. Mes collègues m’ont également dit que c’est toi qui les as extraites et nous tenons à te remercier. Tu m’as rassurée et c’est pourquoi j’ai eu le courage d’ouvrir la porte. Merci Ismaël.
Durant ces heures de terreur et d’angoisse, pendant que cela tirait de partout, vous avez pourtant gardé votre foi et votre calme.
C’est vrai. Paniquer n’arrange rien, ce n’est pas la solution. J’ai beaucoup prié, énormément prié, et puis j’ai pensé à mon fils, que j’ai enterré il y a une semaine. Je crois que c’est lui qui a été notre étoile, c’est lui qui nous as protégées parce que le mot de passe, le code de sécurité, était « Yohann » et dans Yohann il y a Yann. Donc je suis persuadée qu’il a été notre étoile.
Yann que vous avez enterré la semaine dernière. Et vous avez aussitôt repris le travail. On voit sur votre page Facebook que vous êtes très active. Chaque fois que vous allez en mission, vous visitez et prenez toujours en photo les lieux de culte chrétiens.
J’ai toujours eu la foi et je l’aurai toujours parce dans les moments joyeux comme dans les moments difficiles, la foi aura toujours été présente. Je rends grâce à Dieu. Je rends grâce à la Vierge Marie. Elle nous a toujours aidés à nous relever. J’ai confiance en elle. La preuve, nous sommes là aujourd’hui à nous entretenir malgré les événements de Bamako.
Vous êtes la petite-nièce de Léopold Sédar Senghor, vous avez eu une vie privilégiée qui n’incite pas vraiment à cette foi profonde. Votre vie a cependant été marquée par beaucoup de drames. Vous n’en faites pas montre. D’où tenez-vous ce stoïcisme, cette foi, ce courage, car même en allant chercher le corps de Yann à Montréal vous avez continué vos activités sur Facebook, publiant les photos de l’oratoire Saint-Joseph où une messe venait d’être dite en sa mémoire
Je reconnais que j’ai pris cela de ma mère. Maman était une femme très croyante, pieuse, très forte. Et je crois que lui ressemble énormément. La prière a toujours été mon secours et mon réconfort. Et je continuerai à prier.
Durant ces heures de prise d’otage, vous étiez recluse dans votre chambre d’hôtel, vous receviez des instructions, qu’entendiez-vous dehors en ce moment-là ?
J’ai entendu des coups de feu, j’ai entendu des cris, des meubles qui bougeaient, Nous avons tout entendu, mais j’ai essayé de garder mon calme, de ne pas paniquer parce que paniquer dans ce genre de situation ne rend pas service. Mais j’ai beaucoup prié, beaucoup, beaucoup prié.
Au début, vous aviez pensé que c’étaient des portes qui claquaient dites-vous ?
En effet, aux premiers bruits, j’ai cru que c’étaient des portes qui claquaient. Et comme cela continuait, aussitôt ma collègue m’a appelé, elle m’a dit « tu as entendu, ce sont des coups de feu ». Je lui dis « oui ». Elle m’a dit « j’ai peur », je lui dis « moi aussi, mais ça ira ». J’ai appelé l’officier de sécurité et l’Administrateur et ils nous ont donné des consignes que nous avons suivies. Et je dois dire qu’au niveau de Paris, la Secrétaire Générale et toute son équipe n’ont pas arrêté de nous soutenir, de nous rassurer. Nous avons été très, très, soutenues. C’était très important et je tenais à remercier la Secrétaire Générale et toute l’équipe de la Francophonie. Je suis sortie la dernière et je me souviens lorsque je l’a i appelée au téléphone pour la rassurer, c’était des applaudissements de tous mes collègues et cela m’a fait chaud au cœur.
Savez-vous Elisabeth qu’aussi bien à Dakar qu’à Paris, vos amis ont pensé à vous très fortement parce que vous portez le deuil de votre fils Yann ?
C’est vrai qu’il y a eu une vraie chaîne de solidarité et de prières, de mes amis, de mes collègues, de ma famille. C’est pour eux que j’ai lutté et que je continuerai de lutter, parce que je n’ai pas le droit de baisser les bras. L’Ambassadeur du Canada à Bamako nous a merveilleusement reçus et entourés. Et je me souviens de ses mots au moment de nous quitter : « regardez devant vous, il y a des gens qui vous aiment ». Nous regarderons devant nous et nous tiendrons compte des gens qui nous aiment. Le fait que les gens pensaient à nous durant les événements m’a beaucoup touchée et cela a renforcé ma foi.
Quelles étaient vos pensées pendant ces longues heures où vous étiez en survie ?
J’ai pensé à Yann, à Cyril (ndlr : son second fils), Olivier, Patrick, Jean-Philippe (ndlr : ses neveux). J’ai dit « Yann, tu es parti mais moi je ne veux pas partir maintenant. Il faut que tu m’aides pour m’en sortir ». Et j’ai prié. J’étais convaincue que j’allais m’en sortir, que nous allions nous en sortir. Et c’est ce qui est arrivé.
Vous avez malheureusement perdu un collègue, le Belge Geoffrey Dieudonné, membre de l’Assemblée Parlementaire Francophone, mort sous les balles des terroristes.
C’est malheureusement au stade où nous étions regroupés que j’ai appris l’information. Geoffrey était jeune, avec une femme et des enfants. Il était descendu pour prendre son petit-déjeuner et il s’est retrouvé face aux terroristes.
DMF
Autres articles
-
Education : le chef de l’Etat a exhorté le Ministre à finaliser les réformes essentielles pour moderniser le fonctionnement des daaras
-
Financement des projets des épouses des gendarmes et militaires : la DER/FJ et les Forces armées signent une convention
-
Infrastructures de stockage : le Gouvernement et la CNES concluent un accord
-
Mouvement d’humeur à l’UASZ : le campus pédagogique fermé jusqu’à nouvel ordre
-
La liste des médias reconnus par l'Etat : le ministre de tutelle face à la presse vendredi