ants entraînants, guirlandes artisanales et boubous fleuris ... L'allégresse, de rigueur dans la cathédrale de Bambari pour Pâques, n'a pas fait oublier les menaces du quotidien en Centrafrique, le prêtre appelant au calme alors que des milices se rapprochent de cette ville du centre du pays.
Le bâtiment futuriste, dont la forme arrondie et pointue n'est pas sans rappeler une soucoupe volante singulièrement posée en terre africaine, était plein à craquer pour la messe dominicale.
Bien plus d'un millier de fidèles sont arrivés parés de leurs plus beaux atours : maillots de foot ou pagnes, parfois à l'effigie du pape ou de la vierge Marie.
Se détachant au milieu de la foule, un petit bonhomme, 2 ans tout au plus, le regard fixe dans son smoking noir à rayures, trois fois trop grand pour sa taille minuscule.
Point de cantiques psalmodiés comme dans la lointaine Europe. A Bambari, la foule chante, sourit, frappe dans ses mains, au son tropical d'une guitare, d'une basse et de percussions. De petites danseuses en robes vertes et jaunes, mouchoir fleuri à la main, roulent leurs épaules et se déhanchent en rythme devant l'autel.
Mais l'atmosphère paisible est trompeuse et l'abbé Thibault rappelle ses ouailles à la réalité de la Centrafrique d'aujourd'hui.
"Puisqu' aujourd'hui le Christ est ressuscité, il faut oublier tout ce qui s'est passé avant", lance-t-il.
"Les jeunes doivent écouter les anciens car ils ont de l'expérience. Ceux-ci doivent être des modèles (...) Que Dieu réunisse tous ses disciples, divisés pour l'instant."
Et d'informer la foule qu'"un prêtre a été tué" vendredi. Six balles l'ont fauché alors qu'il roulait à moto dans le nord du pays, selon une source sécuritaire.
Plus d'un an après un coup d'Etat, la Centrafrique vit dans le chaos. A 300 km à l'ouest de Bangui, la capitale, Bambari, encore paisible, est menacée. Les milices anti-balaka, composées de jeunes chrétiens, affrontent l'ex-rébellion Séléka, pro-musulmane, à Grimari, à 80 km des portes de la ville. Les pertes civiles sont lourdes.
- "On ne veut pas la guerre" -
Les anti-balaka disent venger les chrétiens des sévices que leur ont infligés les Séléka quand ils étaient au pouvoir entre mars 2013 et janvier 2014, mais ils commettent à leur tour des atrocités.
Chrétiens et surtout musulmans craignent que ces combats, transposés au coeur de Bambari, n'apporte leur cortège de pillages, de destructions, de morts, toutes communautés confondues.
"Maintenant, les musulmans disent que si les anti-balaka viennent leur faire du mal, ils vont se retourner contre les chrétiens pour rendre les coups", s'inquiète à la sortie du culte Camille Pandjikoro, un cultivateur de 53 ans, au col de chemise rapé.
"On ne veut pas la guerre, on ne veut pas de mal", observe sa soeur Madeleine Nguéréthanga, ménagère de 50 ans, engoncée dans un joli boubou bleu. Ses enfants, âgés d'une vingtaine d'année, sont interdits de sortie. "On leur ordonne de rester à la maison pour ne pas qu'ils créent des problèmes."
Mathias René Mati, agriculteur de 44 ans, demande aux jeunes de "ne pas réagir comme ceux de Bangui par rapport aux musulmans", afin d'éviter les tueries qui ont fait des centaines de morts, peut-être des milliers, dans la capitale.
"Il n'y a pas de problème chez les vieux", musulmans comme catholiques, affirme-t-il. "C'est plutôt chez les jeunes" que le bât blesse, d'où de fréquentes réunions pour calmer les esprits, ajoute l'homme, le cou ceint d'un foulard rouge.
Fin de la messe, les mères d'enfants gesticulant ou endormis sur leur épaule quittent la cathédrale, juste derrière les pères, que précède la croix portée par les enfants de choeur.
Une jeep de Sangaris, la force d'interposition française en Centrafrique, passe devant le bâtiment, saluée par une myriade d'enfants bondissants. Comme pour rappeler qu'après cette trêve de Pâques, la dure réalité reprend ses droits à Bambari.
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