Côte d’Ivoire: découverte d’un squelette qui pourrait être celui du journaliste Guy-André Kieffer

Un coin du voile sur la disparition de Guy-André Kieffer en avril 2004 à Abidjan est peut-être sur le point d’être levé. Un squelette découvert vendredi 6 janvier 2012 dans le centre-ouest de la Côte d'Ivoire pourrait être celui du journaliste franco-canadien, selon une source proche du dossier.
Le squelette a été découvert en présence du juge Patrick Ramaël à Issia, à environ 350 km au nord-ouest d’Abidjan. Le magistrat français ne révèle pas qui l’a conduit à l’endroit où le squelette a été trouvé, mais il n’y est pas allé par hasard, estime Alexis Gublin, l’avocat de Bernard Kieffer, le frère du journaliste disparu.
«Des prélèvements ont été effectués en vue d’analyses ADN» qui seront faites en France «le plus rapidement possible», ajoute une autre source. Le juge Ramaël aurait reçu une information d’un habitant d’Issia, qui dit avoir vu des gens enterrer un blanc près d’une rivière, là le squelette a été trouvé.
La longue enquête du juge d'instruction Patrick Ramaël
Des faits qui se sont déroulés à la période de la disparition de Guy-André Kieffer. Les dernières traces du journaliste d’investigation remontent au 16 avril 2004 sur un parking d’Abidjan où il avait rendez-vous. Il enquêtait sur des malversations, notamment dans la filière cacao. L'enquête menée en France sur sa disparition s'est orientée vers l’entourage de Simone Gbagbo, l’épouse du Président de l’époque Laurent Gbagbo.
Les quatre dernières années, le juge Ramaël a effectué plusieurs missions à Abidjan, mais son enquête avait du mal à avancer. Il était encore à Abidjan il y a deux mois. Si les tests ADN confirment que le squelette découvert à Issia est celui de Guy-André Kieffer, l’enquête va de nouveau se concentrer sur la détermination des auteurs et des commanditaires de sa disparition et de son éventuel assassinat.
La réaction de l'avocat de la famille Kieffer, maître Alexis Gublin, au micro de RFI
Maître Gublin se réjouit des avancées dans l'enquête mais reste prudent tant que les analyses ADN n'ont pas révélé l'identité du squelette : «Le juge d’instruction a exploité une piste qui n’est pas récente, et même assez ancienne, sur laquelle il n’avait pas eu la possibilité d’effectuer des vérifications lors de ses précédents déplacements. Toute une série d’éléments concordants amènent à penser qu’il peut s’agir du corps de Guy-André Kieffer.»
L’avocat de la famille Kieffer ajoute : « Aujourd’hui, nous n’avons néanmoins pas de certitude. Il va falloir attendre quelques jours que les résultats des expertises ADN puissent venir confirmer ce soupçon très fort que nous avons ».
Maître Alexis Gublin précise aussi « Le juge d’instruction n’est pas tombé par hasard sur un corps, en plein milieu de la Côte d’Ivoire ».
RFI : étant donné la date à laquelle ce corps aurait été déposé à cet endroit, les circonstances pourraient laisser penser qu’il s’agit bien de Guy-André Kieffer.
« Tout à fait. Tous les éléments sont concordants et nous amènent aujourd’hui à considérer que c’est vraisemblablement la piste la plus exploitable que le juge d’instruction ait eu jusqu’à maintenant. Elle amène à la découverte d’un corps qui peut être celui de Guy-André Kieffer. Mais seules les expertises ADN permettront d’en avoir la certitude.»
L'avocat de la famille Kieffer rappelle enfin que l'enquête s'est toujours dirigée vers la garde rapprochée de Simone Gbagbo, l'épouse de Laurent Gbagbo au pouvoir le 16 avril 2004 jour de la disparition du journaliste.
«...La découverte du corps intervient sur une piste qui n’avait pas pu être exploitée à l’époque où Laurent Gbagbo était au pouvoir. Il a fallu attendre l’arrivée d’Alassane Ouattara pour que les vérifications puissent être faites dans des conditions tout à fait normales. C’est un élément qui, à mon avis, là encore vient accréditer la thèse d’une implication de la garde rapprochée de Simone Gbagbo, ainsi que l’enquête tend à le démontrer depuis le départ.»
RFI : Si jamais l'implication de la garde rapprochée de Simone Gbagbo est avérée, la famille portera-t-elle plainte contre Simone Ggagbo ?
«L’objectif de la famille Kieffer n’est pas de porter plainte contre Simone Gbagbo ou contre qui que ce soit, c’est simplement de connaître la vérité sur ce qui est arrivé à Guy-André Kieffer. Aujourd’hui on a peut-être un élément qui vient boucler un certain nombre d’hypothèses sur lesquelles le juge d’instruction travaille depuis maintenant de nombreuses années. Attendons d’avoir les résultats de l’expertise ADN pour se prononcer sur la suite de cette affaire.»