Il aura fallu attendre huit ans après le premier mandat d’arrêt de la CPI émis en 2006. Huit ans avant que Bosco Ntaganda choisisse finalement de se rendre à la justice internationale. Sans jamais avoir été inquiété pendant près de 15 ans à la tête de différents groupes rebelles mais aussi lorsqu’il était dans l’armée congolaise, de 2009 à 2012.
Pour Bienvenu Ukej, directeur de l’association Justice Plus à Bunia l’ouverture de ce procès est donc un signal fort. « On le croyait intouchable, il se comportait en petit dieu parce qu’il était protégé par plusieurs instances. Le voir comme ça devant le juge, pour les victimes d’abord, c’est un pas de plus contre l’impunité. Voilà quelqu'un qu'on croyait intouchable qui a été déféré devant le juge. C'est déjà une dissuasion envers de potentiels criminels. »
Un signal et l’espoir aussi que ce 4e procès à La Haye qui vise un chef rebelle de l’Ituri donne l’exemple et montre que personne n’est à l’abri de poursuites. Car l’impunité c’est le principal problème d’une région toujours déchirée par les conflits et la présence de groupes armés et où la justice n’arrive pas à suivre comme l’explique l’avocat Roger Logo, coordonnateur du réseau des ONG des droits de l’homme de l’Ituri.
« Les juridictions n’ont pas la main mise sur les gens qui commettent des crimes à ce niveau. Il y a eu beaucoup de cas de viols en masse par exemple, beaucoup de cas d’incendies de maison, beaucoup de cas de meurtres. Jusque là, on ne sait pas encore si les acteurs des FRPI sont inquiétés pour ce genre de faits. »
Le FRPI, Maî Maï Simba, les groupes armés qui commettent des violations graves sont encore trop nombreux en RDC. Reste qu’avec 2149 victimes autorisées à participer à ce procès et la reconnaissance pour la première fois par la justice internationale du chef d’inculpation de viol et d’esclavage sexuel, des milliers de personnes en Ituri espèrent obtenir justice et réparations.
Espoirs de paix à Ngongo
C’est notamment le cas dans le village de Ngongo, quelques toits de chaume au bout d'une mauvaise piste. Ici en février 2003, Bosco Ntaganda et ses hommes auraient attaqué le village dans leur conquête de la ville de Bunia.
Serrés à quatre ou cinq sur des bancs d'écoliers, une soixantaine d'adultes écoutent attentivement un film et des explications sur tous les procès de la CPI depuis sa création. Et quand on demande qui a été victime du chef de guerre, toutes les mains ou presque se lèvent et les langues se délient : « tout le village a été brûlé, sauf les maisons en tôle », se souvient une femme. « Ici on a tué des gens, on a brûlé des maisons, il y a eu des viols ! Ce sont des crimes qui nécessitent une condamnation exemplaire », s’indigne un homme.
Car depuis 2003, il n’y a pas eu de commission Vérité et Réconciliation, ni aucune réparation. Seule la CPI est venue trois fois pour enquêter. Dans cette école aux murs en boue et au toit de tôle, la soif de justice est grande au sein de la population. « Nous demandons la réparation, la paix, après tout ce qui s’est passé. Et qu’ils ne reviennent plus ».
Nicolas Koyaku, chargé des activités de sensibilisation pour la CPI confirme que le besoin de mettre fin à l'impunité est immense : « la population a besoin de plus d’information pour voir quels sont les efforts que déploient la justice nationale et internationale pour mettre un terme à l’impunité. Parce qu’ils aspirent quand même à un monde sans crimes, à un monde de paix pour s’occuper plus des aspects liés au développement. »
Un développement qui se fait toujours attendre dans une région pour l'essentiel agricole. Et où le groupe armé FRPI, reliquat des conflits interethniques des années 2000, harcèle toujours quotidiennement la population.
-
Côte d'Ivoire: Tidjane Thiam auprès de ses partisans pour célébrer sa première année à la tête du PDCI
-
Tchad : le Président Mahamat Idriss Déby promu maréchal
-
Mali: 26 personnes tuées dans des attaques jihadistes près de Bandiagara
-
Le Burkina Faso adopte une loi d’amnistie pour les auteurs du putsch de 2015
-
Guerre au Soudan: plus de 780 civils tués par des paramilitaires à El-Fasher, selon l'ONU