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Au nom du FIS

Le gouvernement algérien envisage aujourd'hui de réhabiliter l'ex-Front islamique du salut, interdit depuis 1992 dans le pays.



Au nom du FIS
Tout ça pour ça… En Algérie, le pouvoir —du moins l’une de ses branches proche du président Abdelaziz Bouteflika— envisage de permettre le retour en politique des militants de l’ex-Front islamique du salut (FIS) après près de vingt années d’interdiction. Commençons par un petit retour en arrière pour comprendre l’ampleur et la portée à la fois symbolique, politique et émotionnelle d’un tel événement.

Le 26 décembre 1991, le FIS, qui dirige déjà la majorité des municipales depuis juin 1990, obtient la majorité presque absolue dès le premier tour des premières élections législatives pluralistes, les premières organisées depuis l’indépendance. Le score est sans appel: 188 sièges pour le parti islamiste, 25 pour le Front des forces socialistes de Hocine Aït-Ahmed et 16 pour le Front de libération national (FLN), parti unique jusqu’en 1989, date de l’adoption d’une Constitution qui consacre le multipartisme.

En Algérie comme ailleurs, le choc est immense. Pour le second tour, le FIS est en mesure de rafler la majorité absolue, ce qui lui permettrait de réviser la Constitution voire de proclamer une nouvelle République —islamique bien entendu. Tout va alors très vite. Des personnalités politiques, parmi lesquelles Saïd Sadi du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) mais aussi des membres de la société civile et des intellectuels (nombre d’entre eux seront assassinés par la suite) en appellent à l’armée pour «sauver l’Algérie».

Le 11 janvier 1992, les généraux «démissionnent» le président Chadli Bendjedid suspecté de s’accommoder d’une victoire du parti religieux. Le scrutin est annulé, le second tour n’aura jamais lieu et l’Algérie va entrer dans la pire période de son histoire depuis 1962.

Très vite, les violences ensanglantent le pays. Le 9 février de la même année, l’état d’urgence est proclamé —il ne sera levé que le 24 février 2011! Le 4 mars, le FIS est dissout par le tribunal administratif d’Alger. Nombre de ses militants sont arrêtés et envoyés sans jugement dans des camps au Sahara. D’autres passent dans la clandestinité et rejoignent les maquis et les groupes armés déjà existants.

De 1992 à 2000, date généralement admise pour désigner la fin de la guerre civile algérienne, les affrontements vont faire entre 150.000 et 200.000 morts et près de 14 milliards d’euros de dégâts matériels. Depuis 1992, le courant représenté par le FIS, ses militants et ses dirigeants sont exclus de la vie politique, même si certains bénéficient d’une amnistie à l’occasion de la Concorde civile voulue par le président Abdelaziz Bouteflika en 1999 et la Charte de réconciliation nationale de 2005.

Aujourd’hui, le gouvernement algérien envisage donc d’amnistier près de 7.000 prisonniers ayant appartenu au FIS et négocie la réintroduction de ce parti dans la vie politique. Les discussions sont menées d’un côté par Abdelaziz Belkhadem, secrétaire général du FLN et proche du mouvement islamiste (il fait partie de ceux que l’on appelle les barbo-FLN) et, de l’autre, par les chouyoukhs Abdelfattah Zeraoui Hamadache et Hachemi Sahnouni, l’un des fondateurs du FIS.

«Les discussions tournent autour de plusieurs points, confie un haut responsable algérien qui souhaite conserver l’anonymat. D’abord, la liste des personnes dont l’amnistie devrait être annoncée à l’occasion de la fête de l’indépendance nationale, le 5 juillet prochain.»

Les Algériens divisés

A priori, les membres du Groupe islamique armé (GIA, créé en juin 1992) ou du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC, créé en février 1998) dont une branche est devenue al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI, 2006) impliqués dans des attentats et des massacres collectifs devraient être exclus de cette amnistie. Toutefois, les négociations portent sur des noms emblématiques de l’ex-FIS tel qu’Anouar Haddam, exilé à l’étranger dès janvier 1992. Des responsables de groupes armés sont aussi concernés, à l’image de Abdelrazak, dit «el-Para», l’un des chefs du GSPC, qui pourrait lui aussi être absout.

Selon le haut responsable interrogé par SlateAfrique, l’autre grand axe des négociations concerne la possibilité «que les futurs amnistiés recouvrent leurs droits civiques et puissent se regrouper en parti politique.» Cela signifie-t-il que l’ex-FIS va être réhabilité? L’intéressé ne livre pas de réponse. Il est vrai que cette perspective indigne nombre d’Algériens, à commencer par les familles des victimes d’actes terroristes et tous ceux qui ne pardonneront jamais au parti religieux d’avoir entraîné le pays dans une terrible violence.Lire la suite sur slateafrique


Mercredi 15 Juin 2011 - 15:20


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