Jean-Yves Le Drian n'en était pas à sa dernière grimace. Pendant le Forum, plusieurs chefs d'Etat et le ministre français se sont interpellés en public, devant les quelque 300 personnes invitées et devant les journalistes. Mais cette fois-ci, c'est le thème libyen, facteur déstabilisant dans la région, et notamment au Mali, qui les a occupés.
« Notre présence à nous, Maliens, est un témoignage de ce que nous sommes aujourd’hui et de ce que nous aurions pu devenir, sans l’intervention décidée il y a deux ans par François Hollande », a affirmé le président malien Ibrahim Boubacar Keïta en ouverture. Mais d'ajouter : « Tant que le problème sud-libyen ne sera pas résolu, nous n’aurons pas la paix. »
Puis le Sénégalais Macky Sall n'y est pas allé par quatre chemins pour demander aux Occidentaux, et donc aussi aux Français, de terminer le travail qu’ils ont laissé inachevé en Libye en 2011. « Malheureusement, la Libye est un travail inachevé, a-t-il dit. Il faut que ceux qui l’ont entamé puissent nous aider à le terminer. A cela, il faut ajouter les influences venues d’Egypte, avec les Frères musulmans qui, par vagues, rejoignent ce pays ; et le commerce du pétrole qui se poursuit et qui alimente le financement de l’armement. Donc, c’est véritablement une poudrière pour la zone sahélienne, qu'il convient de traiter de manière appropriée. » Approbation dans la salle.
Une nouvelle intervention de l'Otan jugée obligatoireet décisive
C'est alors que le ton a changé, lorsque le Tchadien Idriss Déby, premier allié militaire de la France au nord du Mali, a rebondi sur les propos de son homologue sénégalais pour lui lancer : « Mais non Macky, le travail en Libye, les Occidentaux et l’Otan l’ont bien achevé puisqu’ils voulaient tué Kadhafi et qu’ils l’ont bien tué ! Le problème, c’est qu’ils n’ont pas mené le service après-vente. » Nouveaux applaudissements dans la salle, nouvelle grimace pour Jean-Yves Le Drian.
Et Idriss Déby de poursuivre : « En Libye, la solution n’est pas entre nos mains, mais entre celles de l’Otan, qui doit détruire les terroristes comme elle a détruit Kadhafi. » Avant de prendre Jean-Yves Le Drian par le bras pour lui dire : « Monsieur le ministre, vous m’excuserez pour ces vérités, mais c’est vraiment à nos amis occidentaux de trouver une solution dans ce pays. » Et ce dernier de lui répondre diplomatiquement : « Oui, la question libyenne est devant nous, il est nécessaire que la communauté internationale s’en saisisse. »
Est-ce finalement mal que de voir le débat s'installer publiquement et sans concession sur les sujets majeurs ? N'était-ce pas, au fond, l'opportunité de le faire ? La conclusion revient au Sénégalais Macky Sall : « La parole s’est libérée ce soir, rendez-vous dans un an. Inch'Allah ! »
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