Des paroles, mais aussi des actes, écrit notre correspondant à Beyrouth, Paul Khalifeh. L’artillerie turque a poursuivi, dimanche 14 février, le pilonnage de positions des combattants kurdes qui se sont emparés, ces derniers jours, de régions contrôlées par des rebelles islamistes proches de la Turquie. Après l’aéroport de Minnigh et la ville de Deir Jamal, des obus turcs se sont abattus sur le camp militaire de Kibar, près de la ville de Efrin, principal fief kurde au nord d’Alep.
Ces frappes n’ont pas empêché les Unités de protection du peuple kurde de poursuivre leur progression. Ce dimanche, elles ont pris la localité de Aïn Dakna, au nord de Tall Rifaat, une ville située à 20 kilomètres de la frontière avec la Turquie, et défendue par une coalition islamiste, dont le Front al-Nosra, la branche syrienne d’al-Qaïda.
Pour tenter de stopper l’avancée des combattants kurdes, Ankara a fourni des facilités logistiques importantes aux rebelles. La chaine de télévision panarabe al-Mayadeen a rapporté que 400 jihadistes d’un groupe appelé la « Légion de Syrie », partis de la province voisine d’Idleb, sont entrés à Tall Rifaat pour prêter main-forte aux défenseurs de la ville. Pour arriver à destination, ces renforts sont passés avec véhicules, armes et munitions, par le territoire turc. Cette information a été confirmée par l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), proche de l’opposition syrienne.
Des lignes rouges à ne pas franchir
Les Etats-Unis et la France ont demandé l'arrêt immédiat des frappes mais rien n'y fait, nous dit notre correspondant en Turquie, Alexandre Billette : les autorités turques persistent et signent, au risque de se froisser avec ses alliés. Le Premier ministre turc a précisé dimanche : la Turquie ne sera plus passive lorsque ses intérêts nationaux sont en jeu. Ankara l'a répété ses derniers mois : pour la Turquie, l'avancée des forces kurdes à l'Ouest de l'Euphrate est l'une de ces lignes rouges à ne pas franchir.
La présence renforcée de forces kurdes au nord d'Alep ces derniers jours est donc inacceptable aux yeux du gouvernement turc, qui craint par-dessus tout que les Kurdes de Syrie ne parviennent à réunifier l'ensemble des territoires qu'il contrôlent, tout au long de la frontière avec la Turquie. La réaction épidermique d'Ankara aura des conséquences diplomatiques immédiates : la trêve en Syrie évoquée après la rencontre de Munich vendredi n'est plus qu'un lointain souvenir, et les relations entre la Turquie et les Etats-Unis, qui eux soutiennent les forces kurdes, sont sur le point de devenir glaciales.
Source: Rfi.fr
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