Transposition dans le droit républicain du crime de lèse-majesté d’ancien régime, en France, le délit d’offense au chef de l’Etat est aujourd’hui très controversé de par le monde. D’aucuns vont même jusqu’à demander tout simplement son abrogation à cause de “son caractère exorbitant, disproportionné, propice à l’arbitraire et potentiellement attentatoire à la liberté d’expression et d’opinion.”
L’offense au chef de l’Etat, qui implique que l’intention délictueuse soit démontrée, tient à la difficulté de définir juridiquement “l’offense”, atteinte morale très subjective, qui peut permettre de poursuivre abusivement, comme offense au Président de la République, des comportements ou des opinions critiques vis-à vis du pouvoir politique. C’est pourquoi la justice française est très embarrassée pour instruire et juger de tels dossiers, si bien que la plupart du temps, ils ne donnent pas lieu à des condamnations et encombrent inutilement les tribunaux. Et dans le cas où la justice n’a d’autre choix que celui de rentrer en voie de condamnation, le quantum de la peine est le plus léger possible pour rester dans le cadre de la sanction symbolique.
L’usage abusif du crime de lèse-majesté par les monarques est dénoncé par Montesquieu qui lui a consacré de nombreuses pages de son livre L’Esprit des Lois. Il démontre notamment : “C’est assez que le crime de lèse-majesté soit vague, pour que le gouvernement dégénère en despotisme” (chapitre 7 du livre 12 de L’Esprit des Lois). Montesquieu montre, plus loin, dans le chapitre 18 du livre 12 de L’Esprit des Lois “Combien il est dangereux, dans les républiques, de trop punir le crime de lèse-majesté”. Au Sénégal, une ancienne colonie française, dont le droit positif est inspiré de celui de la France, le délit d’offense au président de la république n’est pas inconnu de notre arsenal juridique.
Macky, pas grand seigneur
L’article 254 (loi n°77-87 P.M. – S.G.G.-S.L. du 10 août 1977) du code pénal sénégalais, dispose : “L’offense au Président de la République par l’un des moyens énoncés dans l’article 248 [la radiodiffusion, la télévision, le cinéma, la presse, l’affichage, l’exposition, la distribution d’écrits ou d’images de toutes natures, les discours, chants, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, et généralement tout procédé technique destiné à atteindre le public] est punie d’un emprisonnement de six mois à deux ans et d’une amende de 100 000 à 1 500 000 francs ou de l’une de ces deux peines seulement”.
Il y a aussi le fameux article 80 de la Constitution du Sénégal qualifié de “fourre-tout” par les juristes en ce sens que l’Etat du Sénégal l’utilise de façon abusive à chaque fois qu’il veut embastiller une “grande gueule” dont les paroles et les positions indisposent le Chef de l’Etat. Loin de nous l’idée de faire l’apologie de l’impolitesse ou de l’irrévérence car pétris que nous sommes dans le moule des vertus cardinales, éminemment nôtres, de “yar ak teggin” (bonne éducation), de “kersa” (discrétion), de “worma” (respect d’autrui) et de “sutura” (pudeur).
Mais, force est de reconnaître qu’en faisant cueillir à son domicile Me El Hadji Amadou Sall, pour le traîner jusqu’à la DIC, à la suite de ses accusations d’anthropophagie, le Président Macky Sall a raté une belle occasion de se montrer grand seigneur. Car, franchement, Me El Hadji Amadou Sall n’a jamais été pris au sérieux par les Sénégalais, et même dans son propre camp (le PDS), quand il a sorti de son histoire irrationnelle de mangeurs d’hommes. Les gens pensaient même qu’il délirait ou qu’il était atteint de démence à cause du traumatisme causé par le marathon des auditions de ses frères libéraux.
Aussi, la meilleure réponse qui seyait était-elle de l’ignorer tout simplement et de le laisser avec ses élucubrations plutôt que d’en rajouter avec cette interpellation musclée pour des histoires de macchabées et de zombies qui dénotent de la pauvreté du discours politique en cours au Sénégal.
Et ceux qui insultaient Me Wade
A vrai dire, les deux “dômou baye” (Macky Sall et El Hadji Amadou Sall) auraient pu nous épargner ces procès en sorcellerie alors que nous venons à peine d’échapper à la fin du monde telle que prophétisée par les Mayas. Aujourd’hui, si le Président Macky Sall faisait montre de la même détermination à satisfaire la demande sociale des Sénégalais que sa hargne à casser du responsable libéral, on aurait applaudi à tout rompre.
Cela dit, sans faire dans l’analogie de mauvais aloi, il nous semble utile de rappeler ici quelques propos pour le moins irrévérencieux jetés à la figure du pauvre Président Wade qui aura essuyé le summum de l’insolence verbale :
Oumar Cyril Touré alias Thiât du groupe Y EN A MARRE, lors d’une manifestation du M23 tenue le 23 juillet 2011 à la Place de l’Obélisque,qui plus est, en présence de Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng, Amath Dansokho, Abdoulaye Bathily, Madior Diouf et d’autres papys de l’opposition d’alors, mais tous complices de cette irrévérence envers la “première institution de la république” avait balancé publiquement : “Abdoulaye Wade est un patriarche qui ment” (“Mak muy fenn !”). Sur place, personne ne l’avait rabroué ;
Aminata Tall, lors de la campagne électorale pour la Présidentielle de 2012, avait laissé entendre : “Abdoulaye Wade est frappé de sénescence”. Avant de s’interroger : “Abdoulaye Wade aurait-il été allaité par le sang ?” ;
Aminata Mbengue Ndiaye, à l’occasion d’un meeting pendant la campagne électorale de la présidentielle de 2012, non contente de laisser éclater sa joie quand des militants du Parti Socialiste avaient présenté au public un cercueil sensé renfermer la “dépouille mortelle du président Wade”, aux sons de “Gorgui déena, soul lène co” (“Le vieux est mort, enterrez-le”, avait déclaré péremptoirement : “ le premier sacrifice humain que Abdoulaye Wade a consenti à faire, c’est avec le bateau Le Joola” ;
Barthélémy Dias, quelques minutes après avoir assassiné Ndiaga Diouf, avait déclaré devant les caméras du monde entier : “Si Abdoulaye Wade pense qu’il a le monopole de la bêtise, qu’il…” ;
Moustapha Niasse, en campagne électorale pour le premier tour de la présidentielle de 2012 avait trouvé que : “C’est ce Satan de Abdoulaye Wade qui est à la tête du pays qui est à l’origine des tiraillements dans la coalition Bennoo Siggil Senegaal” ;
Moustapha Niasse, encore lui, en réaction aux accusations de Wade sur le “détournement” d’un bateau de pétrole au détriment de l’Etat du Sénégal avait asséné : “Abdoulaye Wade est un menteur” ;
Moustapha Niasse, toujours lui, avait averti, à la veille du 1er tour de la présidentielle, que : “Celui qui votera Wade, rendra compte à Dieu !”
Benoît Sambou, en meeting à Ziguinchor lors de la campagne électorale pour les législatives du 1er juillet 2012 ne s’était pas gêné pour qualifier Abdoulaye Wade d’homme léger et de voyou”.
Combien de fois aussi, le Président Wade a-t-il été accusé de commanditer des sacrifices humains, pendant la campagne électorale pour la présidentielle de 2012, avec cette histoire de la voiture 4x4 noire aux vitres teintées et qui écumait nos quartiers pour des rapts sur les albinos et les nourrissons ? Notre éducation, mais aussi la décence et le respect envers les Sénégalais nous interdisent de reprendre ici les écarts de langage du doyen Amath Dansokho envers le président Wade. On vous passe le reste de la salve d’injures servies à famille du Président Wade et à ses collaborateurs et qui continuent de plus belle aujourd’hui.
On arrête donc ici la liste non exhaustive d’insanités proférées à l’endroit du président Wade pour ne pas donner l’impression de s’engager dans une litanie de propos orduriers qui constituent, malheureusement, l’essentiel du répertoire discursif de notre classe politique en mal de projets de société crédibles et mobilisateurs.
Un peu plus d’élégance
L’insulte étant l’arme des faibles, nous estimons que le chef de l’Etat, Macky Sall, eu égard aux nombreuses charges qui pèsent sur ses épaules, et de son statut de magistrat suprême de l’Etat, doit prendre de la hauteur, se sublimer, se transcender et dépasser les contingences politiciennes pour se consacrer corps et âme au sacerdoce de premier serviteur de la nation sénégalaise.
On aurait donc moins crié au scandale après “le discours de Mbodiène “si, au même moment qu’il menaçait ses concitoyens, le chef de l’Etat tenait également la bride à ses ouailles en les sommant d’arrêter d’insulter au quotidien le Président Wade et son camp, accusés publiquement de” voleurs de la République “.Les Sénégalais auront noté que dans cette cohue, tout le monde, jusqu’au dernier et plus insignifiant militant de l’APR ou de Benno Bokk Yaakaar, s’y met dans ce qu’il est convenu d’appeler le concert d’insultes sur les libéraux, traités de tous les noms d’oiseaux
Le Président Macky Sall, a-t-il seulement sermonné son directeur de cabinet, Mor Ngom, qui, servant de caisse de résonance aux déclarations de son mentor, a traité les responsables du PDS de “piccu reeteet”( oiseaux de… “) ? Jean Paul Dias avait pour sa part déclaré que 4000 milliards de francs CFA – précision chirurgicale – ont été détournés par les libéraux et planqués à l’étranger, avant de proposer qu’on emprisonne d’abord Wade père et fils et de faire les enquêtes après. Que dire aussi des révélations fracassantes de la garde des sceaux Mimi Touré : “Ces gens [les pontes du PDS] sont plus riches que le budget du Sénégal” ? A l’évidence, l’outrance et l’excès ne sont pas seulement à chercher dans la direction que veut bien nous indiquer le chef de l’Etat. Le Président Macky Sall doit d’abord faire régner l’ordre dans son propre camp qui ressemble à une armée mexicaine où tout le monde est fondé à y aller de son propre réquisitoire contre le régime libéral.
En cette fin d’année 2012, comme il est de tradition, le chef de l’Etat fera une adresse à la Nation le 31 décembre prochain pour formuler ses meilleurs voeux à ses concitoyens. En sa qualité de père de la Nation, le Président Macky Sall devra profiter de cette occasion pour se hisser au dessus des contingences politicojudiciaires et donner le ton de la décrispation du champ politique dont lui seul détient aujourd’hui les clefs.
Ce n’est pas donc en faisant dans les menaces, inutiles du reste, qu’il pourra asseoir et consolider son autorité. Aux propos incendiaires et à la limite de l’outrage dont il serait victime, son statut de chef de l’Etat lui commande de prendre de la hauteur, mais aussi de prendre des décisions courageuses. Le Président Macky Sall devra notamment intimer l’ordre aux “faucons” et va-t-en-guerre de son camp, toutes catégories confondues, de cesser toute attaque ou provocation contre les libéraux accusés, tous les jours, de “voleurs de la République”. Seule la justice est habilitée à qualifier les faits en crimes ou délits éventuels.
Le cas Mimi Touré
Le Président Macky Sall devra rappeler à l’ordre son ministre de la justice, Mimi Touré, afin qu’elle arrête de crier sur tous les toits, chaque jour que Dieu fait, que les mis en cause dans les enquêtes sur “l’enrichissement illicite” sont coupables des faits qui leur sont reprochés, alors que lesdites enquêtes qu’elle-même a confiées au procureur spécial, Alioune Ndao, ne sont pas encore officiellement bouclées. Que Mimi Touré arrête aussi son manque de respect envers ces libéraux qui, quoique faisant l’objet d’enquêtes, méritent tout le respect qui sied à leur rang et à leur statut de responsables et de pères de famille. L’expression vulgaire et indigne d’une ministre de la République de “Gokhi ou la prison” (Dégueuler [l’argent volé] ou aller en prison) est attentatoire à la dignité humaine et assoit déjà, et a priori, la thèse de la culpabilité des enquêtés.
Le Président Macky Sall, qui dit vouloir une démocratie apaisée au Sénégal, devra enfin donner des gages de l’impartialité des enquêtes en cours, en élargissant l’assiette des personnes suspectées de s’être illicitement enrichis aux transhumants et autres gros bonnets aujourd’hui réfugiés dans l’escarcelle du pouvoir pour échapper à la guillotine des auditions. Histoire d’en finir pour de bon avec ces histoires de “Coumba am Ndèye ak Coumba amoul Ndèye”. N’est ce pas le Président Macky Sall qui avait averti et martelé qu’il ne protégerait personne ?
Rien de que la réunion de ces trois conditionnalités évoquées, ci-haut, devrait amplement suffire pour en boucher un coin aux libéraux qui ruent dans les brancards aujourd’hui, et les rassurer – s’ils sont animés de bonne foi – sur les motivations justes des actions enclenchées contre eux. In fine, c’est le Sénégal entier qui gagnerait à avoir des esprits rassérénés, ce qui redonnerait un surcroît d’urbanité et d’élégance dans les joutes verbales qui sont consubstantielles à toute grande démocratie.
PAPE SAMB
PAPEASAMB@HOTMAIL.COM
L’offense au chef de l’Etat, qui implique que l’intention délictueuse soit démontrée, tient à la difficulté de définir juridiquement “l’offense”, atteinte morale très subjective, qui peut permettre de poursuivre abusivement, comme offense au Président de la République, des comportements ou des opinions critiques vis-à vis du pouvoir politique. C’est pourquoi la justice française est très embarrassée pour instruire et juger de tels dossiers, si bien que la plupart du temps, ils ne donnent pas lieu à des condamnations et encombrent inutilement les tribunaux. Et dans le cas où la justice n’a d’autre choix que celui de rentrer en voie de condamnation, le quantum de la peine est le plus léger possible pour rester dans le cadre de la sanction symbolique.
L’usage abusif du crime de lèse-majesté par les monarques est dénoncé par Montesquieu qui lui a consacré de nombreuses pages de son livre L’Esprit des Lois. Il démontre notamment : “C’est assez que le crime de lèse-majesté soit vague, pour que le gouvernement dégénère en despotisme” (chapitre 7 du livre 12 de L’Esprit des Lois). Montesquieu montre, plus loin, dans le chapitre 18 du livre 12 de L’Esprit des Lois “Combien il est dangereux, dans les républiques, de trop punir le crime de lèse-majesté”. Au Sénégal, une ancienne colonie française, dont le droit positif est inspiré de celui de la France, le délit d’offense au président de la république n’est pas inconnu de notre arsenal juridique.
Macky, pas grand seigneur
L’article 254 (loi n°77-87 P.M. – S.G.G.-S.L. du 10 août 1977) du code pénal sénégalais, dispose : “L’offense au Président de la République par l’un des moyens énoncés dans l’article 248 [la radiodiffusion, la télévision, le cinéma, la presse, l’affichage, l’exposition, la distribution d’écrits ou d’images de toutes natures, les discours, chants, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, et généralement tout procédé technique destiné à atteindre le public] est punie d’un emprisonnement de six mois à deux ans et d’une amende de 100 000 à 1 500 000 francs ou de l’une de ces deux peines seulement”.
Il y a aussi le fameux article 80 de la Constitution du Sénégal qualifié de “fourre-tout” par les juristes en ce sens que l’Etat du Sénégal l’utilise de façon abusive à chaque fois qu’il veut embastiller une “grande gueule” dont les paroles et les positions indisposent le Chef de l’Etat. Loin de nous l’idée de faire l’apologie de l’impolitesse ou de l’irrévérence car pétris que nous sommes dans le moule des vertus cardinales, éminemment nôtres, de “yar ak teggin” (bonne éducation), de “kersa” (discrétion), de “worma” (respect d’autrui) et de “sutura” (pudeur).
Mais, force est de reconnaître qu’en faisant cueillir à son domicile Me El Hadji Amadou Sall, pour le traîner jusqu’à la DIC, à la suite de ses accusations d’anthropophagie, le Président Macky Sall a raté une belle occasion de se montrer grand seigneur. Car, franchement, Me El Hadji Amadou Sall n’a jamais été pris au sérieux par les Sénégalais, et même dans son propre camp (le PDS), quand il a sorti de son histoire irrationnelle de mangeurs d’hommes. Les gens pensaient même qu’il délirait ou qu’il était atteint de démence à cause du traumatisme causé par le marathon des auditions de ses frères libéraux.
Aussi, la meilleure réponse qui seyait était-elle de l’ignorer tout simplement et de le laisser avec ses élucubrations plutôt que d’en rajouter avec cette interpellation musclée pour des histoires de macchabées et de zombies qui dénotent de la pauvreté du discours politique en cours au Sénégal.
Et ceux qui insultaient Me Wade
A vrai dire, les deux “dômou baye” (Macky Sall et El Hadji Amadou Sall) auraient pu nous épargner ces procès en sorcellerie alors que nous venons à peine d’échapper à la fin du monde telle que prophétisée par les Mayas. Aujourd’hui, si le Président Macky Sall faisait montre de la même détermination à satisfaire la demande sociale des Sénégalais que sa hargne à casser du responsable libéral, on aurait applaudi à tout rompre.
Cela dit, sans faire dans l’analogie de mauvais aloi, il nous semble utile de rappeler ici quelques propos pour le moins irrévérencieux jetés à la figure du pauvre Président Wade qui aura essuyé le summum de l’insolence verbale :
Oumar Cyril Touré alias Thiât du groupe Y EN A MARRE, lors d’une manifestation du M23 tenue le 23 juillet 2011 à la Place de l’Obélisque,qui plus est, en présence de Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng, Amath Dansokho, Abdoulaye Bathily, Madior Diouf et d’autres papys de l’opposition d’alors, mais tous complices de cette irrévérence envers la “première institution de la république” avait balancé publiquement : “Abdoulaye Wade est un patriarche qui ment” (“Mak muy fenn !”). Sur place, personne ne l’avait rabroué ;
Aminata Tall, lors de la campagne électorale pour la Présidentielle de 2012, avait laissé entendre : “Abdoulaye Wade est frappé de sénescence”. Avant de s’interroger : “Abdoulaye Wade aurait-il été allaité par le sang ?” ;
Aminata Mbengue Ndiaye, à l’occasion d’un meeting pendant la campagne électorale de la présidentielle de 2012, non contente de laisser éclater sa joie quand des militants du Parti Socialiste avaient présenté au public un cercueil sensé renfermer la “dépouille mortelle du président Wade”, aux sons de “Gorgui déena, soul lène co” (“Le vieux est mort, enterrez-le”, avait déclaré péremptoirement : “ le premier sacrifice humain que Abdoulaye Wade a consenti à faire, c’est avec le bateau Le Joola” ;
Barthélémy Dias, quelques minutes après avoir assassiné Ndiaga Diouf, avait déclaré devant les caméras du monde entier : “Si Abdoulaye Wade pense qu’il a le monopole de la bêtise, qu’il…” ;
Moustapha Niasse, en campagne électorale pour le premier tour de la présidentielle de 2012 avait trouvé que : “C’est ce Satan de Abdoulaye Wade qui est à la tête du pays qui est à l’origine des tiraillements dans la coalition Bennoo Siggil Senegaal” ;
Moustapha Niasse, encore lui, en réaction aux accusations de Wade sur le “détournement” d’un bateau de pétrole au détriment de l’Etat du Sénégal avait asséné : “Abdoulaye Wade est un menteur” ;
Moustapha Niasse, toujours lui, avait averti, à la veille du 1er tour de la présidentielle, que : “Celui qui votera Wade, rendra compte à Dieu !”
Benoît Sambou, en meeting à Ziguinchor lors de la campagne électorale pour les législatives du 1er juillet 2012 ne s’était pas gêné pour qualifier Abdoulaye Wade d’homme léger et de voyou”.
Combien de fois aussi, le Président Wade a-t-il été accusé de commanditer des sacrifices humains, pendant la campagne électorale pour la présidentielle de 2012, avec cette histoire de la voiture 4x4 noire aux vitres teintées et qui écumait nos quartiers pour des rapts sur les albinos et les nourrissons ? Notre éducation, mais aussi la décence et le respect envers les Sénégalais nous interdisent de reprendre ici les écarts de langage du doyen Amath Dansokho envers le président Wade. On vous passe le reste de la salve d’injures servies à famille du Président Wade et à ses collaborateurs et qui continuent de plus belle aujourd’hui.
On arrête donc ici la liste non exhaustive d’insanités proférées à l’endroit du président Wade pour ne pas donner l’impression de s’engager dans une litanie de propos orduriers qui constituent, malheureusement, l’essentiel du répertoire discursif de notre classe politique en mal de projets de société crédibles et mobilisateurs.
Un peu plus d’élégance
L’insulte étant l’arme des faibles, nous estimons que le chef de l’Etat, Macky Sall, eu égard aux nombreuses charges qui pèsent sur ses épaules, et de son statut de magistrat suprême de l’Etat, doit prendre de la hauteur, se sublimer, se transcender et dépasser les contingences politiciennes pour se consacrer corps et âme au sacerdoce de premier serviteur de la nation sénégalaise.
On aurait donc moins crié au scandale après “le discours de Mbodiène “si, au même moment qu’il menaçait ses concitoyens, le chef de l’Etat tenait également la bride à ses ouailles en les sommant d’arrêter d’insulter au quotidien le Président Wade et son camp, accusés publiquement de” voleurs de la République “.Les Sénégalais auront noté que dans cette cohue, tout le monde, jusqu’au dernier et plus insignifiant militant de l’APR ou de Benno Bokk Yaakaar, s’y met dans ce qu’il est convenu d’appeler le concert d’insultes sur les libéraux, traités de tous les noms d’oiseaux
Le Président Macky Sall, a-t-il seulement sermonné son directeur de cabinet, Mor Ngom, qui, servant de caisse de résonance aux déclarations de son mentor, a traité les responsables du PDS de “piccu reeteet”( oiseaux de… “) ? Jean Paul Dias avait pour sa part déclaré que 4000 milliards de francs CFA – précision chirurgicale – ont été détournés par les libéraux et planqués à l’étranger, avant de proposer qu’on emprisonne d’abord Wade père et fils et de faire les enquêtes après. Que dire aussi des révélations fracassantes de la garde des sceaux Mimi Touré : “Ces gens [les pontes du PDS] sont plus riches que le budget du Sénégal” ? A l’évidence, l’outrance et l’excès ne sont pas seulement à chercher dans la direction que veut bien nous indiquer le chef de l’Etat. Le Président Macky Sall doit d’abord faire régner l’ordre dans son propre camp qui ressemble à une armée mexicaine où tout le monde est fondé à y aller de son propre réquisitoire contre le régime libéral.
En cette fin d’année 2012, comme il est de tradition, le chef de l’Etat fera une adresse à la Nation le 31 décembre prochain pour formuler ses meilleurs voeux à ses concitoyens. En sa qualité de père de la Nation, le Président Macky Sall devra profiter de cette occasion pour se hisser au dessus des contingences politicojudiciaires et donner le ton de la décrispation du champ politique dont lui seul détient aujourd’hui les clefs.
Ce n’est pas donc en faisant dans les menaces, inutiles du reste, qu’il pourra asseoir et consolider son autorité. Aux propos incendiaires et à la limite de l’outrage dont il serait victime, son statut de chef de l’Etat lui commande de prendre de la hauteur, mais aussi de prendre des décisions courageuses. Le Président Macky Sall devra notamment intimer l’ordre aux “faucons” et va-t-en-guerre de son camp, toutes catégories confondues, de cesser toute attaque ou provocation contre les libéraux accusés, tous les jours, de “voleurs de la République”. Seule la justice est habilitée à qualifier les faits en crimes ou délits éventuels.
Le cas Mimi Touré
Le Président Macky Sall devra rappeler à l’ordre son ministre de la justice, Mimi Touré, afin qu’elle arrête de crier sur tous les toits, chaque jour que Dieu fait, que les mis en cause dans les enquêtes sur “l’enrichissement illicite” sont coupables des faits qui leur sont reprochés, alors que lesdites enquêtes qu’elle-même a confiées au procureur spécial, Alioune Ndao, ne sont pas encore officiellement bouclées. Que Mimi Touré arrête aussi son manque de respect envers ces libéraux qui, quoique faisant l’objet d’enquêtes, méritent tout le respect qui sied à leur rang et à leur statut de responsables et de pères de famille. L’expression vulgaire et indigne d’une ministre de la République de “Gokhi ou la prison” (Dégueuler [l’argent volé] ou aller en prison) est attentatoire à la dignité humaine et assoit déjà, et a priori, la thèse de la culpabilité des enquêtés.
Le Président Macky Sall, qui dit vouloir une démocratie apaisée au Sénégal, devra enfin donner des gages de l’impartialité des enquêtes en cours, en élargissant l’assiette des personnes suspectées de s’être illicitement enrichis aux transhumants et autres gros bonnets aujourd’hui réfugiés dans l’escarcelle du pouvoir pour échapper à la guillotine des auditions. Histoire d’en finir pour de bon avec ces histoires de “Coumba am Ndèye ak Coumba amoul Ndèye”. N’est ce pas le Président Macky Sall qui avait averti et martelé qu’il ne protégerait personne ?
Rien de que la réunion de ces trois conditionnalités évoquées, ci-haut, devrait amplement suffire pour en boucher un coin aux libéraux qui ruent dans les brancards aujourd’hui, et les rassurer – s’ils sont animés de bonne foi – sur les motivations justes des actions enclenchées contre eux. In fine, c’est le Sénégal entier qui gagnerait à avoir des esprits rassérénés, ce qui redonnerait un surcroît d’urbanité et d’élégance dans les joutes verbales qui sont consubstantielles à toute grande démocratie.
PAPE SAMB
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