Les troupes paramilitaires dirigées par le général Hemedti sont issues des milices janjawids, qui ont participé au génocide du Darfour au début des années 2000, au cours duquel le viol a été utilisé comme arme de guerre. Vingt ans plus tard, elles reproduisent à travers le Soudan leur campagne d’humiliation.
À Omdurman, une victime a accepté de témoigner à condition de rester anonyme. Nous l’appellerons Fatima. La jeune femme de 28 ans a fui le quartier d’Oumbada sous le joug des paramilitaires. La rencontre est organisée à l’abri des regards dans une salle de classe d’une école convertie en centre d’accueil pour des familles réfugiées des combats.
Le 14 janvier 2024, Fatima est enlevée par trois soldats des Forces de soutien rapide. Au prétexte que son oncle travaille dans les douanes, elle est accusée de collaboration avec l’armée régulière. « Ils m’ont emmenée dans une maison obscure. Il était minuit et demi environ. C’était très sombre, mais je pouvais sentir l’odeur du sang. Après m’avoir frappée, ils m’ont traînée par la jambe dans les escaliers jusqu’au deuxième étage. Le plus gradé d’entre eux est venu à moi. Il m’a dit : “Tu collabores avec l’armée. Je vais te violer pour jeter la honte sur ton oncle”. J’ai dit que j’étais tout juste mariée, que j’étais encore vierge. Il a dit : “Je ne connais pas ce mot”. Il m’a violée, pleure la jeune femme. Il est redescendu. Le deuxième soldat est monté, puis le troisième. »
« J’étais devenue sa chose »
Ce que raconte Fatima est arrivé à des milliers d’autres. Selon nos informations, les paramilitaires ont organisé un trafic d’esclaves sexuelles à travers le pays. Des centaines de femmes ont été vendues sur des marchés au Darfour. « L’un d’entre eux a dit : “Maintenant, on la bute”. Il a tiré en l’air. Mais l’officier a dit : “Non, moi, je la veux. Je la prends avec moi”. Il m’a dit que j’aurais la vie sauve à une condition : “Tu rentres chez toi, tu prends tes affaires, et à 5 heures du matin, tu pars avec moi. On va aller à Nyala, ou à El Fasher (au Darfour).” Après m’avoir violée, j’étais devenue sa chose, il pensait pouvoir faire de moi ce qu’il voulait. Quand je suis rentrée chez moi, je ne tenais plus debout. J’ai tout raconté à ma mère qui m’a dit : “Tu ne pars pas avec eux”. Elle a demandé au voisin de faire le guet. Il n’y avait personne dans la rue. À 3 heures du matin, on s’est enfui. »
Une fois franchies les lignes de front, Fatima est interrogée par les renseignements de l’armée régulière. Ils veulent des informations sur l’ennemi. Personne ne se soucie de son état. C’est un nouvel enfer qui commence, celui du silence. « Quand mon mari l’a su, il s’est énervé, il a voulu divorcer. Au bout d’un mois, il a dit qu’il avait reçu un message de Dieu. Il a accepté de me garder à la condition que je ne dise rien à sa famille ni à personne. Chez nous au Soudan, ce sont des choses qu’on ne peut pas dire, c’est la honte. En dehors de mes parents, de ma tante, personne ne sait. »
Quatre ans après la révolution contre le régime d’Omar el-Béchir, qui avait porté un vent d’espoir pour les femmes, les Soudanaises sont les premières victimes de la guerre.
À Omdurman, une victime a accepté de témoigner à condition de rester anonyme. Nous l’appellerons Fatima. La jeune femme de 28 ans a fui le quartier d’Oumbada sous le joug des paramilitaires. La rencontre est organisée à l’abri des regards dans une salle de classe d’une école convertie en centre d’accueil pour des familles réfugiées des combats.
Le 14 janvier 2024, Fatima est enlevée par trois soldats des Forces de soutien rapide. Au prétexte que son oncle travaille dans les douanes, elle est accusée de collaboration avec l’armée régulière. « Ils m’ont emmenée dans une maison obscure. Il était minuit et demi environ. C’était très sombre, mais je pouvais sentir l’odeur du sang. Après m’avoir frappée, ils m’ont traînée par la jambe dans les escaliers jusqu’au deuxième étage. Le plus gradé d’entre eux est venu à moi. Il m’a dit : “Tu collabores avec l’armée. Je vais te violer pour jeter la honte sur ton oncle”. J’ai dit que j’étais tout juste mariée, que j’étais encore vierge. Il a dit : “Je ne connais pas ce mot”. Il m’a violée, pleure la jeune femme. Il est redescendu. Le deuxième soldat est monté, puis le troisième. »
« J’étais devenue sa chose »
Ce que raconte Fatima est arrivé à des milliers d’autres. Selon nos informations, les paramilitaires ont organisé un trafic d’esclaves sexuelles à travers le pays. Des centaines de femmes ont été vendues sur des marchés au Darfour. « L’un d’entre eux a dit : “Maintenant, on la bute”. Il a tiré en l’air. Mais l’officier a dit : “Non, moi, je la veux. Je la prends avec moi”. Il m’a dit que j’aurais la vie sauve à une condition : “Tu rentres chez toi, tu prends tes affaires, et à 5 heures du matin, tu pars avec moi. On va aller à Nyala, ou à El Fasher (au Darfour).” Après m’avoir violée, j’étais devenue sa chose, il pensait pouvoir faire de moi ce qu’il voulait. Quand je suis rentrée chez moi, je ne tenais plus debout. J’ai tout raconté à ma mère qui m’a dit : “Tu ne pars pas avec eux”. Elle a demandé au voisin de faire le guet. Il n’y avait personne dans la rue. À 3 heures du matin, on s’est enfui. »
Une fois franchies les lignes de front, Fatima est interrogée par les renseignements de l’armée régulière. Ils veulent des informations sur l’ennemi. Personne ne se soucie de son état. C’est un nouvel enfer qui commence, celui du silence. « Quand mon mari l’a su, il s’est énervé, il a voulu divorcer. Au bout d’un mois, il a dit qu’il avait reçu un message de Dieu. Il a accepté de me garder à la condition que je ne dise rien à sa famille ni à personne. Chez nous au Soudan, ce sont des choses qu’on ne peut pas dire, c’est la honte. En dehors de mes parents, de ma tante, personne ne sait. »
Quatre ans après la révolution contre le régime d’Omar el-Béchir, qui avait porté un vent d’espoir pour les femmes, les Soudanaises sont les premières victimes de la guerre.
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