Le président Macky Sall est arrivé au pouvoir, le 19 mars 2012, dans le cadre d’une dynamique démocratique, citoyenne et progressiste, conçue lors des Assises Nationales, faite de dialogue et de concertation. À 18 mois de la fin de son second mandat, notre pays est plus divisé que jamais à cause sa démarche politique clivante.
RENIEMENT DE L’ESPRIT DES ASSISES
Au début de son mandat, il semblait s’inscrire dans une perspective de respect des dispositions de la Charte de gouvernance démocratique, qu’il avait, bien malgré lui, fini par signer pour bénéficier du soutien du peuple des Assises.
Mais à mesure que la date des présidentielles de février 2017 approchait, les préoccupations politiciennes allaient reprendre le dessus. En effet, lors du référendum du 20 mars 2016, il allait soumettre un projet de réforme constitutionnelle contenant des mesures en porte-à-faux avec les engagements antérieurs en matière de refondation institutionnelle.
Parmi ceux-ci, le plus emblématique était certainement la recommandation du conseil constitutionnel de supprimer, du projet de réforme, la disposition relative à la réduction de deux ans du septennat en cours, au motif qu’elle n’était conforme ni à l’esprit de la constitution, ni à la pratique constitutionnelle. Il s’en suivit un report de 2 ans, les présidentielles de 2017.
Parmi ceux-ci, le plus emblématique était certainement la recommandation du conseil constitutionnel de supprimer, du projet de réforme, la disposition relative à la réduction de deux ans du septennat en cours, au motif qu’elle n’était conforme ni à l’esprit de la constitution, ni à la pratique constitutionnelle. Il s’en suivit un report de 2 ans, les présidentielles de 2017.
En réalité, la renonciation délibérée du président Macky Sall à la réduction de son mandat constituait le dernier acte du processus de remise en cause de la totalité de l’héritage des Assises nationales. Cela se traduira aussi par le refus du président de valider des conclusions essentielles de la C.N.R.I - surtout le projet de constitution.
Par la suite, sa gouvernance sera caractérisée par un autoritarisme excessif, se traduisant par des atteintes aux libertés et l’éviction de ses rivaux potentiels, par une judiciarisation extrême du jeu politique, avec l’organisation de procès irréguliers contre Karim Wade et Khalifa Sall.
SEPT "FAUX SAGES"
Une autre entorse au processus de refondation institutionnelle prôné par les Assises par le président Sall est constituée par des régressions manifestes, dans le cadre de la gestion du processus électoral avec la loi sur le parrainage citoyen et une propension maladive à invalider les listes de l’Opposition, aussi bien lors des locales de janvier 2022 que dans le cadre des prochaines législatives de juillet 2022.
La dernière décision du conseil constitutionnel amputant de moitié les listes des 2 principaux challengers des prochaines législatives, constitue un signal évident voire lumineux de l’état d’agonie dans lequel se trouve la démocratie sénégalaise. En effet, les experts du Droit sont unanimes pour réaffirmer le caractère indivisible des listes de candidats constituée de titulaires et de suppléants.
Ce "putsch civil", lourd de dangers pour la paix civile, symbolise donc, jusqu’à la caricature, cette volonté d’exclusion du chef du clan Benno-APR, qui a dû se résoudre à sacrifier les suppléants de sa liste nationale, dans son obsession morbide de pulvériser toute forme de résistance à ses velléités autocratiques.
Enfin, le verdict des "7 faux sages" va à l’encontre des règles politiques généralement admises, qui préconisent une approche consensuelle garante d’un climat apaisé, en matière de gestion des processus électoraux, ce que ne permet pas une lecture littérale du droit, auquel on tord le cou pour les beaux yeux du prince. Cela permet d’éviter de tenir des élections, sous état d’exception, avec des forces de défense et de sécurité, écartelés entre maintien de l’ordre et sécurisation des opérations de vote.
C’est dire que le système démocratique a des exigences, auxquelles, l’ensemble de la classe politique doit souscrire, sous peine d’assister à une interruption brutale des normes démocratiques par un putsch.
ENTENTE PROGRAMMATIQUE DÉLAISSÉE
Face à cette démission de la coalition présidentielle concernant l’héritage des Assises nationales, force est de constater, que du côté de l’Opposition, qui ambitionne de remporter les législatives de juillet prochain, on ne parle – pour le moment, tout au moins - ni de refondation institutionnelle, ni de programme alternatif.
Au sein des coalitions et des alliances politiques, l’entente programmatique est reléguée à l’arrière-plan. Elle constitue, le plus souvent, la dernière étape des négociations politiques, derrière la quête des suffrages, remplacée par des notions vagues comme la cohabitation ou une assemblée de rupture, qui ne renseignent pas suffisamment sur les projets politiques des différents protagonistes.
Pire, nous assistons plutôt à des tiraillements sur des questions de préséance au niveau des listes de candidatures et à des erreurs dans la confection des listes.
Les péripéties rocambolesques notées dans le processus électoral ne pourront pas occulter une réalité politique intangible apparue lors des dernières élections locales, que ni les arrêtés d’un ministre partisan ni les décisions tronquées d’un conseil constitutionnel partial et docile ne pourront changer, c’est la perte inéluctable de majorité par la Coalition Benno Bokk Yakaar.
Les hommes politiques responsables de l’Opposition doivent, au-delà de leurs différentes chapelles, s’investir pour la refondation institutionnelle telle que prônée par les Assises nationales, en commençant par la rénovation de notre processus électoral déstructuré par au moins une décennie de manipulations.
Dr Mohamed Lamine LY
Grand-Mbao ; Cité Baye Niasse
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