Pour une énième fois, le Président de la République nous a rappelé ses relations historiques avec la presse lors de l’inauguration des locaux du groupe Walf, « quand j’étais élève à l’école William Ponty, il n’y avait pas de presse. Un beau matin, on a vu circuler un journal tapé à la machine intitulé : A l’ombre du baobab. Je l’avais écrit seul sans mettre mon nom, et tout le monde trouvait ça très intéressant ». Dans cette même logique soutenue certainement par des convictions politiques, il a crée tout au long de son parcours des journaux : le Démocrate, Sopi, Takussan, Demain l’Afrique.
Voilà un passé qui devait faciliter une compréhension entre Wade et la corporation des journalistes. C’est n’est pas le cas ! Et c’est le Président qui a un petit pincement au cœur : «si le vent a tourné grâce à vous, j’étais un peu triste de n’avoir pas été compris par les journalistes alors que ces derniers auraient dû remonter dans son passé pour connaître ma conception du journalisme ». Mais pourquoi ça coince ?
La réponse est pourtant simple, la presse malgré toutes les reproches cherche toujours à jouer son rôle : informer, éduquer, divertir. Le premier élément de la mission pose problème. Le problème vient des tenants du pouvoir même si le Chef de l’Etat veut nous faire comprendre qu’il n’est pas : « un président qui achète des journalistes ». Par acheter, on comprend corrompre. Qui peut nous assurer de l’absence totale de la corruption dans les relations entre la presse et le pouvoir ? Dans l’un des derniers rapports du Forum Civil sur l’état de la corruption au Sénégal, il a été noté que le secteur de la presse, était l’un des secteurs les plus touchés par le phénomène, à côté de la santé et de la police. Pourquoi chercher à corrompre ? Pour qu’on arrête de parler des scandales, de donner la parole à tous ceux qui ne sont pas d’accord avec le système en place, de rappeler aux tenants du pouvoir leurs promesses d’hier… Le plus difficile pour le régime, c’est de voir des journalistes qui jouent parfois leur jeu sans renoncer totalement à leurs missions. Dans une de ses rencontres avec les patrons de presse, le Président avait dit : « je n’aide pas des gens qui viennent après m’attaquer ». Au-delà du débat que ce n’est pas son argent mais celui du contribuable sénégalais, le Chef de l’Etat veut parfois montrer la voie à suivre à la presse. Le journaliste n’est pas un politicien contrairement à ce dernier il survit difficilement à la « transhumance ». Nous voulons parler de tous les journalistes, qui ont décidé d’arrêter d’informer juste, pour se battre à côté des politiques et le plus malheureux de se battre pour un homme et non pour des idées et des convictions.
Le Président doit comprendre une bonne fois pour toute, qu’une presse libre et indépendante qui a pour mission d’informer, éduquer, divertir est différente d’une presse de combat politique et idéologique. Alors Sopi ou Démocrate, c’étaient des journaux d’une époque d’un contexte. Si ces journaux étaient ressuscités aujourd’hui, dix ans après l’alternance politique et dans ce contexte politique tumultueux sur fond de crise économique, ils allaient avoir le même sort comme beaucoup de journaux proches du pouvoir qui sont morts de leur belle mort.
Monsieur le Président, entre vous et la presse, y’a pas grand-chose à comprendre. Un fond d’aide à la presse d’un milliard ne va pas changer cette donne. Vous pouvez le faire ce sera votre mérite et cela va conforter davantage cette conviction que vous avez de la presse : « je crois à la presse comme une dimension de la démocratie ».
En attendant votre Radio Télévision Africaine(RTA).
NDIAGA DIOUF. Journaliste
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