En 2016, la plupart des Etats ont signé les textes contre l’utilisation des enfants dans les conflits armés*. Pourtant, il y aurait quelque 250 000 jeunes âgés de 6 à 18 ans mêlés à une trentaine de conflits dans le monde. Alors que depuis 2002, selon le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, la participation de ces derniers aux conflits armés est interdite, les enfants continuent ainsi d’être utilisés dans les guerres.
Consommant moins de nourriture que les adultes, dociles et influençables, ils sont combattants, poseurs de mines, voire porteurs, messagers, espions, cuisiniers, esclaves sexuels, etc. Si la majorité d’entre eux s’enrôlent pour fuir la maltraitance ou la pauvreté, beaucoup sont recrutés de force ou kidnappés. Les garçons forment le gros des troupes, mais ils ne sont pas les seules victimes. Les filles se battent comme eux et représenteraient presque la moitié des enfants soldats dans le monde.
Certaines s’engagent volontairement pour échapper à un esclavage domestique ou un mariage forcé. Enfants soldats, elles sont souvent victimes de viol, de traite, d’exploitation et de mutilations sexuelles, avec des risques de grossesses non désirées, des conditions d’accouchement tragiques et une exposition aux MST (maladies sexuellement transmissibles) dont le Sida. Au Sri Lanka, elles ont même été utilisées comme kamikazes par les troupes indépendantistes des Tigres de libération de l'Eelam tamoul contre l'armée gouvernementale durant la guerre civile.
L'Afrique, plus grand « recruteur »
C’est sur le continent africain que les enfants soldats sont les plus nombreux - Mali, Ouganda, RCA, au Rwanda, en Somalie et auSoudan du Sud, etc. - et principalement dans la région des Grands Lacs.
En Europe, des enfants soldats auraient été impliqués dans des groupes armés en Tchétchénie et en Russie. Sur le continent américain, la Colombie détient le triste record du nombre d’enfants soldats : 14 000 enfants auraient été engagés dans les rangs de groupes politiques armés et de groupes paramilitaires soutenus par l'armée. En Haïti, selon un rapport de l'ONU de 2010, il n'y aurait plus de recrutement d'enfants soldats mais des enfants seraient utilisés par des éléments armés dans la ville de Port-au-Prince et dans ses alentours pour faire passer de la drogue, transporter des armes, intervenir lors d’affrontements armés, etc.
Au Proche-Orient, des enfants soldats sont présents en Israël et dans les Territoires palestiniens occupés, en Irak et en Iran. En Syrie, la branche d'al-Qaïda, le Front al-Nosra, mais aussi les Unités de protection du peuple kurde (YPG), des milices pro-Bachar el-Assad ainsi que le Hezbollah, recruteraient également des enfants-soldats dans leurs rangs.
Depuis peu, le groupe Etat islamique diffuse des vidéos dans lesquelles apparaissent des enfants soldats dont certains sont âgés d’à peine dix ans ; ils seraient aujourd’hui, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) plus d’un millier à avoir été recrutés et 89 auraient déjà été tués. Dans un scénario des plus macabres, les « lionceaux du Califat », comme ils sont appelés par les adultes jihadistes, interviennent dans une mise en scène où ils égorgent ou tirent des balles dans la tête d’otages.
→ Lire aussi : Syrie: le recours inquiétant aux enfants-soldats
Les enfants soldats sont aussi très nombreux à être enrôlés en Asie (Afghanistan, Inde, Laos, Philippines). En Indonésie et au Sri Lanka, les Nations unies notent que le recrutement n'existe plus mais qu'une présence d'enfants soldats dans certaines régions est toujours effective. C’est en Birmanie que la situation est la plus alarmante car l’Etat participe à l’enrôlement des enfants dans les conflits : des enfants âgés de 12 à 18 ans sont recrutés de force par l’armée gouvernementale.
Des Etats qui participent au recrutement
Par ailleurs, selon le département américain, les forces armées gouvernementales du Yémen, de la Syrie, du Soudan, du Soudan du Sud, de la RDC, de la Somalie et du Nigeria ont elles aussi recruté entre avril 2014 et mars 2015 des enfants soldats. Si en Somalie et en RDC la situation semble cependant s’améliorer, il n’en va pas de même dans les autres pays listés.
Au Soudan du Sud par exemple, selon l’ONU, quelque 12 000 enfants soldats se battent au sein de l’Armée populaire de libération du Soudan (APLS) et des groupes rebelles du Soudan du Sud. Certains ont combattu durant plus de quatre ans et beaucoup ne sont jamais allés à l’école.
Une lutte en demi-teinte
Surtout destinés aux adultes, les programmes DDR (Désarmement, Démobilisation, Réintégration) des Nations unies, visant à reconstruire la paix et la stabilité, ainsi que le développement à long terme des sociétés après les conflits, ont tout de même permis de démobiliser plus de 100 000 enfants dans plus de 15 pays. Par ailleurs, l'Unicef, avec ses partenaires, mène un vaste programme de libération, de réinsertion et de prévention des enfants soldats.
Mais l’élément essentiel de tout « sauvetage » de ces jeunes aux vies brisées par la violence et la brutalité est l’éducation, un combat que mènent de nombreuses ONG partout dans le monde. Aussi, lutter contre la pauvreté, comme le souligne Amnesty International, lutter contre les violences faites aux filles, lutter contre l’impunité, travailler avec les communautés locales, s’efforcer de convaincre les groupes armés d’arrêter sous peine de sanctions, travailler sur les programmes de réinsertion, lutter pour un commerce d’armes contrôlé, sont autant de réponses pour éradiquer l’utilisation des enfants soldats.
Des blessures physiques et psychologiques
Les conflits armés qui ensanglantent le monde ces dernières décennies n’ont jamais fait autant de victimes civiles puisqu’elles représenteraient actuellement 90 % des tués. Et parmi elles, la moitié serait des enfants. Enfants soldats ou pas, l’impact des guerres sur les plus petits est dès lors considérable. En une décennie, plus de deux millions d’enfants ont été tués, au moins six millions ont été blessés dont une grande partie souffre d’invalidité permanente.
Les impacts psychologiques sont également dramatiques. Les petits qui se retrouvent face à la décomposition de leur vie sociale, au stress, à la guerre, à la mort de leurs parents, aux viols de leurs sœurs ou de leur mère, demeurent psychologiquement traumatisés à vie.
Pour les enfants parvenant à échapper à la guerre, leur sort reste malgré tout peu enviable. Ils seraient quelque vingt millions réfugiés dans les Etats voisins ou déplacés dans leur propre pays. Pire, sur les dix dernières années, plus d’un million sont devenus orphelins ou ont été séparés de leur famille.
Source: Rfi.fr
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