C'est comme si la bobine de ce navet de 2003 avait fait d'elle-même un flash back : on a l'impression, à écouter Obama sur la crise libyenne, d'entendre encore Bush Jr réciter sa litanie contre l'Irak : "Saddam Hussein Must Disarm". Le prétexte, à l'époque, c'était les armes de destruction massive ; aujourd'hui, pour voler au secours de populations longtemps maintenues dans un terrorisme d'État naguère pourtant béni par tous, les États-Unis déploient la grande armada autour de Benghazi, jetant la gêne aussi bien auprès des insurgés locaux que de la communauté internationale. ; car comment et pourquoi sauver les Libyens et pas les Iraniens ou les Palestiniens en bute à Israël depuis cinquante ans et dans des proportions pires encore ?
Aujourd'hui, avec la contre-offensive du camp des loyalistes, à l'ouest comme au sud, la déclaration de guerre aura-t-elle lieu pour permettre à Obama de déclencher les hostilités et de déloger par la force des armes le leader de la Jamhariya ?
Alors que des navires de guerre Us entraient en Méditerranée en effet, la tactique de guerilla enclenchée par le camp khadaffiste démontrait que les insurgés n'étaient pas des foudres de guerre et les dissensions occidentales posent une sérieuse équation à ceux qui veulent voler au secours des populations locales : faut-il, comme avec l'Irak, imposer un blocus de l'espace aérien libyen pour empêcher Khadafi de bombarder les insurgés ? Car, après une première opération de communication menée par le fils mardi, le guide lui-même reprenait apparemment les choses en main et a retrouvé ses élans de tribun des premières heures de la Révolution du 31 août 1969.
Pourquoi, alors, tant d'empressement au moment où la France, engluée dans les affaires d'un président homme-orchestre, à la fois premier ministre, ministre de l'Intérieur, des Affaires étrangères, de la Culture, que cette Gaule donc se cherche des ministres aptes à la fonction ? Il ne reste plus en effet que l'onction de la "communauté internationale" (Usa-Europe) pour lancer la nouvelle "Tempête du Désert", probablement le 20 mars prochain, journée internationale de la Francophonie. Car il faut sauver le peuple libyen martyre et l'extraire des griffes de ce sanguinaire despote éclairé qui a déjà fait près de 7.000 morts. Les Iraniens tentent-ils depuis un an une révolution du jasmin qui ne dit pas son nom ? Les Palestiniens n'essayent-ils pas de rompre le joug colonial et raciste d'Israël depuis plus de cinquante ans ? Apparemment dans l'indifférence généralisée de ce même Occident ayant d'autres impulsions et motivations que celles de l'humanitaire.
Et, comme de par le passé, c'est aussi l'heure des bravades dans le camp d'en face, tout en sachant devoir livrer une ultime bataille perdue d'avance. Quelques heures après l'annonce par le Pentagone du déploiement de forces américaines près de la Libye, en effet, les spartiates de Khadaffi se sont signalés à Dehiba, poste à la frontière avec la Tunisie ; et le Guide a multiplié les effets pour ne pas se laisser contourner et étouffer, avec des raids nocturnes sans grand succès à date.
Non mais, sommes-nous entrain de revivre l'histoire à rebrousse-poil ?
Car le script actuel ressemble étrangement à ce qui se faisait naguère, quand le monde avait quand même une conscience morale. Nous ne sommes pas loin, en effet, des événements de 1986 avec le bombardement des États-Unis de la Libye (appelé opération "Gorge d'El Dorado) le 15 avril 1986 avec un certain mauvais acteur de série "B" nommé Ronald Reagan, à l'époque de "Terminator" où il fallait montrer ses biceps. Avec la seule différence qu'à l'époque, l'humanité avait quelque dignité. Ainsi, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté la résolution 41/38 du 20 Novembre 1986 qui « condamne l'attaque militaire commise contre la Jamahiriya arabe libyenne socialiste le 15 avril 1986, qui constitue une violation de la charte des Nations Unies et du droit international. »
Tout évoque aussi le 21 octobre 1805 (1) avec la bataille de Trafalgar : la grande armada yankee, appuyée par la flotte de la fière Albion de Nelson, mouille aux larges de Trafalgar-Tripoli, à la recherche de Khadaffi. Aujourd'hui, après les événements du 11 septembre, l'Amérique, seule au besoin, la "communauté internationale", mouton de Panurge, à contre-cœur, recherchent Ben Laden sous tous les tchadors, sous tous les traits, sous toutes les latitudes. La révolution de jasmin et le printemps arabe de 2011 sont donc un bon prétexte pour régler définitivement son compte à ce terroriste des années 80 que la France a reçu en grandes pompes en décembre 2007, au point de coûter son poste à Rama Yade dans la rubrique liquidée (par la suite) des Droits de l'homme.
La parodie de l'histoire nous ramène au Moyen-Age de la modernité. Et les missiles "Scud" vont probablement circuler sous peu, une fois l'Onu poussée à adopter une résolution autorisant certains à liquider d'autres plus faibles, sous le couvert moderne d'un malthusianisme géopolitique.
Il n'empêche : l'assassinat de Saddam Hussein le 31 décembre 2006 n'a pas bouleversé la face du monde et n'a pas permis une meilleure humanisation des relations internationales.
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(1)-La bataille de Trafalgar oppose le 21 octobre 1805 la flotte franco-espagnole sous les ordres du vice-amiral Villeneuve, à la flotte britannique commandée par le vice-amiral Nelson (source : Internet).
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