Selon le communiqué final des ministres de la CIRGL et de la SADC, la réunion ministérielle conjointe a « pris acte de la décision des FDLR de se rendre et de déposer les armes volontairement ». « La reddition et le désarmement volontaires doivent être effectués dans les six mois environ à compter du 2 juillet 2014, une évaluation vérifiable étant menée à mi-parcours », précise ce communiqué. Autre recommandation : « Exiger des FDLR d'effectuer leur reddition complète dans le délai fixé et les avertir des conséquences militaires qui découleront de leur non-respect du délai convenu ». La réunion ministérielle appelle également à un renforcement du mécanisme créé pour l'évaluation et la mise en œuvre du processus de désarmement et de rapatriement vers le Rwanda. Aucune autre solution n'est envisagée, notamment pas l'option évoquée par la Monusco et le gouvernement congolais d'un autre pays d'accueil pour ceux qui ne souhaiteraient pas rentrer chez eux.
Ce communiqué a été arraché après de longues heures de discussions, mercredi à Luanda. Une véritable bataille rangée, selon l’un des participants, autour de la question du délai accordé aux FDLR. Certains pays comme le Rwanda et l’Angola souhaitaient un délai beaucoup plus court. La durée de trois mois a été évoquée. Finalement, c’est un moratoire de six mois avec une évaluation à mi-parcours « vérifiable » qui a été retenu, comme le souhaitaient surtout les délégations congolaises, sud-africaines et tanzaniennes. « Le terme vérifiable est très vague et on parle d’environ six mois », regrette un observateur étranger.
Qui sont les FDLR ?
Les FDLR sont divisés en trois groupes armés. Il y a les Foca, la branche armée majoritaire. En 2008 et 2010, elle a connu deux dissidences : les FDLR Rud et Soki.
Ce sont les Foca qui ont annoncé leur intention de déposer les armes. Ce groupe est militairement structuré. La troupe est constituée de jeunes Rwandais, qui étaient pour l’essentiel enfants lors du génocide ou nés après 1994, mais aussi de jeunes Congolais. Les officiers, eux, sont tous rwandais et pour la très grande majorité des ex-FAR, l'armée rwandaise d'avant 1994. Selon la Monusco, qui dit disposer d'une liste nominative, une dizaine de FDLR, civils comme militaires, sont recherchés par le Rwanda pour crimes de génocide. Parmi lesquels Sylvestre Mudacumura, l'un de leurs principaux chefs qui, lui, est aussi recherché par la CPI pour des crimes de guerre. Ceux-là sont exclus de tout processus de désarmement, selon la mission onusienne, et doivent être présentés devant la justice.
Les officiers FDLR vivent ensemble depuis vingt ans dans les forêts du Congo. Ils y ont développé d'importantes activités commerciales, minières notamment. Leur mission, expliquent-ils, est de protéger les dizaines de milliers de réfugiés rwandais vivant dans l'est du Congo des attaques de Kigali, après notamment les massacres de1996 et 1997. Ces réfugiés qui vivent sous leur coupe servent, selon plusieurs sources militaires, de boucliers humains et leur donnent un poids politique.
Car ces FDLR-Foca ont aussi une branche politique qui s'est alliée depuis janvier à d'autres partis et notamment celui de l'ancien Premier ministre rwandais Faustin Twagiramungu. Cette aile politique entend obtenir un dialogue avec le gouvernement rwandais, ce que ce dernier refuse. Pour la première fois, la semaine dernière, une délégation de FDLR avait rencontré les envoyés spéciaux de la communauté internationale pour les Grands Lacs sous l’égide de Sant’Egidio. Cette réunion avait provoqué l’ire de Kigali.
Le désarmement en questions
Sur les dix dernières années, selon l’ONU, 11 000 FDLR ont déjà déposé les armes. Les estimations du nombre de combattants encore actifs aujourd’hui varient d'une source à l'autre. Ils sont plus de 3 600 pour Kigali. 1 800 pour les estimations les plus basses. Depuis l’annonce en décembre dernier de leur intention de déposer les armes, un peu moins de 200 combattants FDLR et quelque 400 membres de famille se sont rendus dans les centres de démobilisation dans l'est de la RDC.
Il existe aujourd'hui deux camps qui accueillent les premiers FDLR démobilisés dans le cadre de ce nouveau processus, l'un au Nord-Kivu à Kanyabayonga et l'autre au Sud-Kivu à Walungu. Ce sont de simples camps de transit dans lesquels les quelques 180 combattants et leurs familles sont sommairement installés depuis un bon mois déjà. Ces camps sont quasi-saturés. Or, au Sud-Kivu, une cinquantaine de combattants FDLR attendent leur tour.
Or, ces 600 premiers Rwandais n'ont pas vocation à rester là. S'ils le souhaitent, ils devraient pouvoir rentrer au Rwanda. Les autres devraient être envoyés à l'ouest, loin des Kivu. D'abord à Kisangani puis en Equateur, à la base navale Irebu, le long du fleuve Congo. Mais là-bas, logistiquement, rien n'est encore prêt. Que va-t-il se passer en cas d'afflux dans les prochaines semaines ou prochains mois ?
Autre point inquiétant, selon plusieurs sources onusiennes, y compris le groupe d'experts des Nations unies, même s'ils affirment qu'ils ont déposé les armes, les FDLR continuent de recruter et de s'entraîner. Alors comment présumer de leur bonne foi ? Sur quels critères sera faite l'évaluation de mi-parcours prévue par la CIRGL et la SADC qui doit avoir lieu dans les trois mois ? Et comment va réagir la Monusco dont le mandat est de neutraliser ce groupe armé ? Politiquement, comme militairement, ce communiqué pourrait empêcher toute intervention militaire onusienne dans les six prochains mois. Notamment parce que la brigade d'intervention de l'ONU est composée de militaires issus des pays de la SADC. Or, le patron de la mission, Martin Kobler, avait fait de la « question FDLR » sa priorité pour 2014.
Source : Rfi.fr
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