Les experts de l’ONU persistent et signent. Dans un document de 44 pages remis aux membres du Conseil de sécurité le 12 octobre, le groupe d’expert (GoE) chargé de surveiller l’application des sanctions de l’ONU en République démocratique du Congo réaffirme et détaille les accusations portées à l’encontre du Rwanda et de l’Ouganda dans leur rapport préliminaire du mois de juin.
« Le gouvernement du Rwanda continue de violer l’embargo sur les armes en apportant un soutien militaire direct aux rebelles du M23, en facilitant leur recrutement, en encourageant et facilitant les désertions au sein des FARDC [armée congolaise, NDR], ainsi qu’en fournissant des armes, des munitions, des renseignements et des conseils politiques ».
Un lien direct entre les rebelles du M23 et le commandement militaire rwandais
En dépit des efforts diplomatiques et des déclarations d’intention, le GoE constate que « grâce au soutien des forces armées rwandaises et ougandaises », le M23 (dont les effectifs sont estimés à 1 250 hommes), a continué sa progression au cours de l’été dans l’est de la RDC.
Le rapport évoque une « série d’attaques » au cours du mois de juillet 2012 dans le territoire du Rutshuru et parle d’une « intervention directe des forces spéciales rwandaises » pour aider à prendre la ville de Kiwanja. « Les forces armées rwandaises ont armé les rebelles, facilité l’évacuation des blessés vers le Rwanda et partagé des équipements de communication avec le M23 ».
Les armes livrées par le Rwanda et l’Ouganda comprennent, note le GoE, des mitrailleuses lourdes de 12,7 mm, des mortiers de 60 mm, 91 mm et 120 mm ainsi que des roquettes anti-char et des moyens anti-aériens. Si le soutien de l’Ouganda est « d’une intensité moindre que le Rwanda », les auteurs observent que Kampala a permis au groupe rebelle d’opérer librement sur son territoire et d’améliorer ses relations extérieures.
Les experts établissent un lien direct entre les rebelles du M23 et le commandement militaire rwandais. La chaîne de commandement du M23 comprend, selon eux, le général mutin congolais Bosco Ntaganda qualifié de « plus haut commandant rebelle sur le terrain » et remonte ensuite jusqu’au ministre rwandais de la Défense, James Kabarabe, chef « de facto »de la rébellion.
Corruption au sein de l'armée congolaise
Dans un chapitre intitulé « Tentatives du M23 pour ouvrir un front dans l’ouest de la RDC »,les experts de l’ONU notent que les rebelles ont pris contact avec l’opposition congolaise pour tenter de nouer des alliances, sans toutefois préciser si cette démarche a abouti. Le rapport pointe également la corruption au sein de l’armée congolaise. « Les FARDC continuent d’être infestées par des réseaux criminels générant des revenus pour les officiers supérieurs (…) à travers le contrôle des ressources naturelles et la contrebande ».
L’essentiel de ce rapport s’appuie sur les témoignages d’anciens soldats du M23 et de témoignages recueillis auprès des populations locales. Les soldats rwandais opérant avec le M23 sont identifiés par « leurs uniformes, leurs équipements, leur façon de patrouiller et leurs accents ».
Ces nouvelles accusations ont été vigoureusement démenties par le Rwanda et l’Ouganda. Dans un entretien avec un quotidien américain, Louise Mushikiwabo, la ministre rwandaise des Affaires étrangères, accuse le chef du groupe d’expert, Steve Hege, de mener une vendetta personnelle contre l’actuel pouvoir rwandais. « Ces experts n’ont pas pris la peine de contacter le Rwanda avant de porter ces accusations. Ce sont des méthodes de travail très contestables »,a ajouté le diplomate rwandais Olivier Nduhungirehe, à New York.
Le Conseil de sécurité a toutefois jugé ces informations suffisamment crédibles pour affirmer vendredi « son soutien total au groupe d'experts de l'ONU » qui a rédigé ce rapport et exiger l’arrêt « de tout appui extérieur » aux rebelles du M23. Le rapport doit être officiellement adopté le mois prochain.
Source : Rfi
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