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Les comptes et mécomptes de Latif Coulibaly



Les comptes et mécomptes de Latif Coulibaly

Le  rappeur américain  Curtis James Jackson, universellement  connu sous le nom d’artiste «Fifty cent»,  porte ce sobriquet en hommage à un malfrat de son quartier, qui gardait systématiquement 50% du butin provenant du racket de ses comparses. Apparemment plus dur en affaires que «Fifty cent», Abdou Latif Coulibaly et son acolyte, l’inénarrable  avocaillon Me El hadj Diouf, eux, ne veulent laisser « que » 20 % aux  flibustiers qui ont mis en coupe réglée  pendant 12 ans un pays pauvre très endetté appelé Sénégal pour peu qu’ils se donnent la peine de bien vouloir remettre les 80 % du fruit de leurs rapines aux autorités.  Vous aurez compris qu’on  veut parler de cette histoire abracacadabrantesque de «médiation pénale» qui a mis la République sens dessus dessous.  «Promotion du vol», «encouragement à piller  les deniers publics»…

Les cris d’orfraie, et à juste raison, n’ont pas manqué de fuser de toutes parts, dès que les deux apprentis sorciers ont  proféré leur énormité, véritable hérésie juridique, qui ferait honte à un étudiant de première année de droit.  Et dans l’art de se tirer une balle dans le pied, de mettre  son gouvernement dans la mélasse et le chef de l’Etat dans l’embarras, difficile de faire mieux que Abdou Latif Coulibaly. La performance est historique et même sous le régime de Wade, resté pourtant célèbre pour ses invraisemblables palinodies, on  n’avait pas atteint une tel record: en une semaine,  le journaliste néo-apériste s’est fait mouché par sa collègue de la Justice,  rembarré par Rewmi, un parti allié,  tancé par son propre groupe parlementaire, canardé par la société civile, corrigé sévèrement par les juristes dont l’ancien président de l’Ums, et pour finir en beauté, désavoué, en réunion du conseil des ministres, par le président  de la République ! Quand un homme  politique subit pareille humiliation, il ne lui reste  plus qu’à démissionner.

Mais il serait très étonnant que  le désormais fameux « Monsieur 20% » ait cette dignité. Le messie de Sokhone a trop rêvé des lambris dorés de la République  et des ors du palais  pour avoir cette grandeur. Il se contentera plus sûrement  de regarder ses petits souliers, lui qui est désormais la risée de tout le Sénégal, en priant que l’orage passe. Le pouvoir doit avoir des effets décidément corrosifs pour que Latif Coulibaly, hier censeur et procureur impitoyable des Wade et de leurs dérives, chevalier blanc de la lutte contre la corruption, ait osé théoriser « une médiation pénale » dont même les présumés délinquants ne veulent pas entendre parler ! Pour une bonne et simple raison  qui tombe sous le sens: accepter son principe serait faire  aveu  de culpabilité.

Emporté par ce zèle si propre aux nouveaux courtisans, à peine invité à la table du conseil des ministres qu’il a tant convoitée, le ton sentencieux, il avait décrété, péremptoire, que « la justice sénégalaise est nulle ». Ce qui lui avait valu, déjà,  une sortie au vitriol de l’Ums.  Devant la bronca des juges, Latif avait fait machine arrière et ravalé  ses propos irresponsables.
  
Comment après de tels camouflets à répétition peut-on encore  avoir la prétention de porter la parole d’un gouvernement qu’on a fini de décrédibiliser ? Comment  après avoir émis sa proposition indécente, Coulibaly peut-il encore garder le portefeuille de la « Bonne gouvernance » ? Les bailleurs de fonds du Sénégal peuvent-ils continuer d’avoir  comme interlocuteur un homme qui s’est définitivement grillé avec cette catastrophe juridique qui est parti pour être l’un des pires loupés d’une république qui se voulait « vertueuse » ?
 
 Fodé Diop Massaer
fodediop67@yahoo.fr
 

Fodé Diop Massaer

Samedi 9 Mars 2013 - 11:56


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