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Sénégal - Nouveaux maires et présidents de conseils ruraux: Que faire pour réussir ?



En installant de nouvelles équipes municipales et rurales, le 22 mars 2009, les populations ont souhaité se donner des chances de bénéficier d’un changement de qualité dans la gouvernance de proximité. L’euphorie de la victoire passée, les heureux élus seront donc bientôt confrontés à la dure réalité de la gestion des mairies et communautés rurales. A cet effet, il leur faudra d’emblée éviter trois erreurs et mettre en œuvre trois stratégies.

La première erreur consisterait à ne pas se donner le temps de penser avant d’agir. Plutôt que de foncer tête baissée dans la mise en œuvre des vagues idées rassemblées avant l’élection, il leur faudra ainsi prendre soin de bien comprendre les problèmes de la collectivité locale, les programmes mis en œuvre par les anciennes équipes ainsi que les nouvelles attentes des populations, toutes choses qui requièrent l’engagement d’une démarche de planification stratégique. Il est donc primordial, pour tout nouveau maire ou président de conseil rural, d’élaborer un Plan de développement local qui couvrira la période quinquennale du mandat et qui servira de boussole pour la conduite des chantiers du changement et de référence pour la conclusion de programmes-cadres avec l’Etat et de partenariats avec les bailleurs de fonds et avec les autres collectivités au Sénégal et de l’étranger. Ce Plan, décliné en actions opérationnelles et doté d’un dispositif de suivi-évaluation, devra être conçu de manière participative, en associant, non seulement tous les élus municipaux ou ruraux, mais également les forces vives de la collectivité et les populations dans les quartiers et les villages. Plutôt que de chercher à tout résoudre en cinq ans, le maire ou le président de conseil rural devra se concentrer sur les besoins prioritaires, y axer sa communication et y mettre toute son énergie. Un tel travail de planification nécessitant un minimum de temps pour être bien conduit (trois mois dans l’idéal), il importe de définir, pour les 100 premiers jours du mandat, un programme d’urgence ciblant les questions qui ne peuvent pas attendre et qui doivent être résolues hic et nunc. Pour la Ville de Louga, il s’agira, par exemple, de remettre en marche les lampadaires publics en panne, de verser la subvention due aux postes de santé, de stopper les dépôts sauvages d’ordures, d’installer des panneaux publics solaires et de construire une route en latérite reliant les quartiers périphériques et la ville, d’assurer la sécurité autour du projet Peul qui serait un refuge pour les serpents, d’engager des procédures pour assainir le quartier Touba Seras ou d’interdire illico presto le déversement des eaux polluantes tirées des fosses sceptiques dans les champs qui sont à la périphérie de la ville. Le succès dans l’application de ce programme intérimaire servira d’ailleurs pour renforcer la légitimité et le soutien des citoyens et permettra à la nouvelle équipe municipale et rurale de consolider et d’accélérer le rythme des réformes, une fois terminée la définition du Plan quinquennal de développement local.

La deuxième erreur à éviter, c’est de ne pas considérer le poste de maire ou de président de conseil rural comme un sacerdoce, mais comme une occasion d’améliorer sa situation personnelle et celle des ses proches et amis. Même s’il ne choisit pas, lorsque sa situation le lui permet, de renoncer au salaire, au carburant et aux autres avantages liés à la fonction (comme je m’étais engagé à le faire à Louga si j’étais élu maire), le chef de l’exécutif local devra s’en tenir à ces privilèges et s’évertuer à ne pas brader les maigres ressources de la collectivité et à ne vendre indument ni parcelle ni tout autre patrimoine de la collectivité. Les élus et les citoyens devront, en tout état de cause, s’ériger en sentinelles pour s’assurer que la transparence demeurera continuellement au cœur de la gestion municipale ou rurale.

La troisième erreur que pourrait commettre le maire ou le président de conseil rural, c’est de s’isoler et ne pas associer l’ensemble des élus et des populations dans le management des problèmes locaux. A cet effet, en plus de la mise en place d’un conseil de concertation et du recrutement de volontaires municipaux, il est recommandé de mettre sur pied un conseil de quartier ou de village, comprenant une dizaine de membres, qui serait notamment mobilisé pour l’élaboration et la mise en œuvre du Programme de Développement Economique et Social du quartier ou du village. Une telle approche permet de susciter une émulation dans la collectivité locale et de faire que les idées fleurissent et que les quartiers et les villages rivalisent d’ardeur. La tenue de sessions décentralisées du conseil municipal ou rural, et l’ouverture d’une maison communautaire, dans chaque quartier ou village, contribueront à renforcer ce sentiment d’appartenance et l’engagement des populations à tous les niveaux.

En définitive, les résultats du mandat se déterminent dès les premiers pas du nouvel élu. Réussira celui qui saura prendre les bonnes stratégies et s’entourer d’excellents collaborateurs.

Par Moubarack LO
Président de l’Institut Emergence
Coordonateur du Mouvement And Suxali Louga et conseiller municipal de la Ville de Louga
Email : lo.emergence@sentoo.sn

Moubarack LO

Mardi 21 Avril 2009 - 13:24


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